lundi 8 décembre 2008

Avanie pense que ce n'est pas tromper

6 avis

Nous avons enfin pu avoir les de Grignan à déjeuner aujourd'hui. Depuis que je les avais rencontrés chez les parents de ma cousine Framboise, il m'arrivait de penser avec nostalgie à cette famille de haute lignée, à l'élégance de Mme de Grignan - à laquelle je me réfère souvent lorsque je m'habille - à la fortune du père et à l'arrogante morgue du bel Hermance. Je me souvenais de ce dernier, lycéen, évoquant Miller et Bukowski, juste pour me faire rougir. Il taquinait Framboise qu'il aimait ridiculiser mais nos rapports ont toujours été basés sur un plan plus intellectuel. J'étais donc très impatiente de le revoir aujourd'hui car je n'ai guère l'occasion d'avoir des discussions littéraires avec les membres de mon entourage.

Framboise était là, ainsi que ses parents mais la pauvre ne tenait pas debout. Je crois qu'elle souffrait d'une gastroentérite mais que la bienséance l'avait empêchée d'annuler le repas. Après tout, le premier rendez-vous avec la famille élargie, d'un couple de fiancés est très important. Je comprends qu'elle n'ait pas voulu reporter la joie de montrer son bonheur à ses cousins les plus proches.

A sa place, pourtant, j'aurais hésité. Hideuse, le maquillage dégoulinant, les chevilles tordues sur des chaussures trop hautes, elle éclatait de rire dès qu'Hermance ouvrait la bouche et fonçait aux toilettes dès qu'il lui prenait la main. Ma chère cousine n'était vraiment pas à son avantage et je voyais bien aux regards qu'il me lançait qu'Hermance était rongé par le doute. Soucieuse du bien-être de Framboise, je faisais pourtant de mon mieux pour mettre son promis à l'aise, tapotant son genou sous la table, chuchotant des phrases d'Anaïs Nin à son oreille (j'avais passé la nuit à réviser).

Il commençait à se dérider et je profitais avec délice de sa conversation d'érudit, quand Framboise s'étala sur la table et lui renversa une bouteille de vin dessus. S'ensuivit une panique générale. Le père d'Hermance rattrapa Framboise qui roula avec lui sur le sol. La mère d'Hermance s'évanouit dans les bras de Côme qui me criait :
"Appelle la bonne, appelle la bonne, il faut prêter un nouveau costume à Hermance !"

Le problème est que j'avais justement donné congé à la bonne. Il m'a fallu accompagner notre invité dans le dressing pour l'aider moi-même. Il semblait très choqué par l'incident et se contenta d'écarter les bras :
"Avanie, ma chère, il va falloir que vous m'aidiez à me déshabiller. Je ne le puis."
J'ai à peine hésité. Dans les moments graves il faut savoir prendre sur soi et laisser sa pudeur de côté. J'ai tourné le verrou de la porte pour éviter que celle d'Hermance ne se froisse si on le surprenait entrain de se changer. Je l'ai déshabillé. Ses chaussures à lacets étaient difficiles à ôter. Son slip aussi était tâché de vin et il m'a fallu l'en débarrasser. A un moment, il vacilla et s'appuya sur ma tête, des deux mains.

Je ne savais pas que cela pouvait être aussi délicieux...

dimanche 5 octobre 2008

Les mortifications d'Avanie

3 avis

La vie est parfois trop injuste. Pour une fois que je convaincs Côme de laisser ses sous-fifres remplir ses fonctions pendant que nous partons pour de longues vacances méritées, il y a un souci.

Je m'étais occupée de tout. Je n'avais pas regardé à la dépense. Côme méritait ce qui se fait de mieux. Tout cela nous a coûté des sommes astronomiques. Qui ont été décuplées lorsqu'il nous a fallu rentrer une semaine plus tôt pour cause de crise financière. Le bienfait des journées à nous prélasser a été annulé en un appel téléphonique. J'ai pleuré pendant tout le trajet du retour alors que Côme remuait sa jambe nerveusement en consultant les cours de la Bourse. Je DÉTESTE quand il fait ça ! Heureusement que Shana était là pour s'occuper d'Aloysius, j'en aurais été incapable.

Bref, il me semble que chaque fois que je suis heureuse, il m'arrive un malheur. Par exemple, il suffit que j'aille chez la manucure pour me casser un ongle après. Si je choisis de faire réaliser un brushing chez le coiffeur, il pleut, j'ai oublié mon parapluie et Karl s'est endormi au volant de la voiture. Sans parler toutes les fois où mon fils a vomi sur une robe haute-couture que je n'avais jamais portée. Je me demande ce que j'ai fait pour mériter ça !

Cette fois, bien sûr, les choses étaient un peu plus graves. A peine arrivés à l'aéroport, Côme m'a confiée à Karl venu nous attendre et s'est engouffré dans la limousine envoyée par sa société. Les jours suivants je ne l'ai pratiquement pas vu. Quand il était là il repoussait son assiette. Regardait mes nouvelles robes d'un œil qui me paraissait soupçonneux. Un jour, Maria-Magdalena m'a prise à part pour me demander - en toute franchise, depuis le temps qu'on se connait - s'il y avait un risque qu'elle se retrouve à la rue... C'est alors que j'ai réalisé que nous risquions d'être ruinés.

J'ai décidé d'être un peu raisonnable pour ne pas aggraver la situation et j'ai retardé les payes de tous mes domestiques. J'ai aussi choisi de garder pour moi les cadeaux que j'avais ramenés pour Bertille, Framboise et Léontine. Je ne voulais pas avoir l'air futile alors que le nombre de gens mourant de faim dans le monde était en augmentation constante.

J'ai vainement tenté de m'intéresser à ce qui se passait mais franchement, c'est d'un ennuyeux ! J'ai vite décroché. Finalement j'ai décidé de jouer carte sur table avec Côme. A la fin d'un repas je lui ai proposé un petit massage :
'Tu es tellement tendu mon bien-aimé, en ce moment, cela te fera du bien."

Il n'a pas refusé et je me suis glissée sous la table.

Quand son affaire fut finie, je lui ai demandé :
"Dis-moi tout, très cher, sommes-nous pauvres ? Tu sais que je t'aimerai malgré tout. Je serais même prête à revendre quelques unes de mes robes si tu le souhaites.
Il a éclaté de rire, ce qui m'a fort surprise. Il est rarement aussi spontané. Entre deux hoquets il a hurlé :
- Mais non, Avanie, nous sommes bien plus riches encore !
- Ciel, comment se fait-ce ? ai-je demandé.
- Je ne le sais pas moi-même !
- C'est presque indécent alors ?
- Totalement, a dit Côme."

Ce qu'il m'a infligé après l'est plus encore.

jeudi 17 juillet 2008

Léontine se vautre dans le luxe

7 avis

Ce matin, il m’a fallu forcer la main de Framboise afin qu’elle mette un peu d’ordre dans son souk intérieur. J’attendais en effet une visite d’importance. Elle a bien entendu commencé par me présenter diverses objections sans fondement aucun : « oui, mais j’aime mon bordel, il est à moi ce bordel, et d’ailleurs je m’y retrouve parfaitement, c’est un bordel parfaitement ordonné, si tu ranges, je ne retrouverai plus rien ».

Dans ce bordel, comme elle se plaît à le définir, j’ai retrouvé quantité ahurissante de tubes de lubrifiants, de préservatifs, dont certains étaient ouverts et tout à fait secs, de la lingerie masculine et féminine, certains autres tissus bien plus délicats à déterminer, des revues datant pour certaines de plus de deux ans (toutes intéressantes à maints égards néanmoins, pour qui s’intéresse aux modes éphémères). Rien d’organique en tout cas ; ce qui me rassura quelque peu : Framboise et Griotte sont certes fâchées avec le rangement mais elles ne le sont aucunement avec l’hygiène.

Je ne suis pas bégueule, j’ai moi-même mis la main à la pâte pour ainsi dire et effectué quelque activité de soubrette. D’ailleurs, passés quelques atermoiements bien compréhensibles, Framboise et Griotte se sont pliées de bonne grâce à mes exigences. Griotte a mis la stéréo à fond, une musique qui m’est étrangère a envahi l’appartement mais je crains de ne pas avoir trouvé cela si déplaisant. Dansant toutes trois à demi nues sur un air qui répétait inlassablement : « come on and love me now ! », nous avons tenté de remettre un peu d’ordre.

Quand le jeune homme en livrée sonna à la porte, l’appartement des filles avait retrouvé visage humain et nous étions apprêtées de manière aussi charmante et distinguée qu’il se peut, prête à l’inspecter et à le recevoir !

Je crois déjà vous en avoir informé mais je n’ai pas vocation à jouer les pique-assiettes chez Framboise, ni à vivre sur la laine du dos d’autrui. Aussi, avec le soutien parfaitement dévoué de Sampiero, j’ai organisé le transbahutage de mes effets personnels pour emménager au Crillon ce mercredi.

Je sais ce que vous allez me dire. Le Crillon, c’est surfait. Les footballeurs y célèbrent désormais leur victoire devant une foule vulgaire et hystérique et même si l’établissement est géré par Monsieur Ercoli, personne de valeur au demeurant, nous savons aussi que l’honorable famille Taittinger a cédé ce mythique établissement à une grande société américaine. A ce train là, on se demande s’ils ne vendront pas bientôt des hot dogs dans le hall d'entrée.

Toujours est-il que je tenais pour mon grand retour à ne pas manquer à la tradition. L’Hôtel de Crillon n’est pas une auberge de jeunesse. On n’y vient pas pourvu d’un sac à dos et d’une gourde. On n’y vient pas pour passer une nuit, comme s’il s’agissait de faire halte sur une aire d’autoroute ; on y vient pour s’installer. Pour y résider ! Et pour ce faire, il faut solliciter le personnel « porteur ».

Toujours grâce à Sampiero et à ces quelques recherches sur internet (il sait comme j’aime les traditions d’antan), j’ai sollicité les services de la Compagnie des Indes, entreprise presque centenaire qui assure pour vous le transport de vos bagages et vous les installe avant même votre arrivée entre les murs de votre chambre. Vos effets, votre garde-robe, vos bijoux, artifices, tout est respectueusement emballé dans de magnifiques malles de cuir et de cuivre. On se croirait aux meilleures heures de Pondichéry !

Autrefois, la Compagnie organisait les voyages de familles entières d’Europe sur la péninsule indienne, mais aussi à Ceylan et sur toute l’Indochine.

Vous pensez si j’ai inspecté le jeune homme qui me fut envoyé. Qualité du cheveu, hygiène dentaire, propreté des ongles, respect de l’uniforme, élocution. « Madame, vos effets ont été déposés dans votre chambre. A quelle heure souhaitez-vous en prendre possession ? Une voiture vous attendra à l’heure qui vous convient… » C’est tout un blabla, je suis d’accord avec vous, mais un blabla qui s’appelle luxe. Pour un peu, j’aurais soupesé son entrejambe.

Griotte, qui ne semble pas en manquer une, demanda, au jeune homme : « et à ce prix là, pas de champagne ? ». Clignant de l’œil, il me fallut rattraper son écart : « Pardonnez cette enfant, elle ne sait pas encore que le luxe n’a pas de prix ». Le jeune homme, ne sachant que répondre à cette répartie cinglante n’en perdit pas pour autant le sens de sa mission. Il n’était guère que onze heures du matin, mais il se plia à nos exigences. Il consentit également à respecter la moindre de nos injonctions. Il sortit nous approvisionner en champagne et but donc avec nous, férocement. Nous pûmes ainsi constater l’étendue parfaite de son hygiène corporelle, tout l’après-midi durant. Griotte garda le jeune homme dans sa chambre et, me voyant partir, ne parvint pas non plus à s’empêcher de déclarer, sous l’œil noir et enivré de Framboise : « Tata, il faut vraiment que vous nous visitiez plus souvent ».

Le trajet jusqu’au Crillon se passa comme dans un rêve. Le personnel ne fut pas à la hauteur de cet homme en livrée de la Compagnie des Indes mais il fut acceptable, tout du moins sur l’échelle de mon jugement. Quand j’entrai dans la chambre, dix malles majestueuses m’attendaient, elles portaient le tampon de la Compagnie, de beaux éléphants aux énormes défenses d’ivoire portant les effets de quelque richissime colon anglais et de grands sacs débordant de thé. Chaque malle était légèrement parfumée et exhalait des odeurs de jasmin, d’encens, d’épices, de chanvre, et je dois avouer que cette explosion de fragrances me fit tourner la tête.

Aussi, je ne me rendis pas compte tout de suite de la présence de Sampiero, tout à fait nu, au milieu de la pièce. Il avait donc choisi ce jour là pour me déclarer sa flamme. Au bord de l’évanouissement, j’articulai quelques mots qui le brisèrent en milliers d’éclats : « pas aujourd’hui, Sampiero, je n’ai pas arrêté de la journée ». Je disparus dans la chambre où je dormis d’un sommeil bienheureux, jusqu'au jeudi matin.

lundi 14 juillet 2008

Vilaine Avanie

6 avis

Aujourd’hui j’ai du mal à m’asseoir.

Non, formulons les choses par ordre d’importance.

J’ai décidé d’arrêter de bloguer. Du moins en famille.

Comme Mère le disait chaque fois que Papa se plaignait d’elle à table : « on ne lave pas son linge sale en public !
- Nous sommes en famille Eusebia, ironisait mon père.
- Et bien ce n’est pas mieux ! répliquait ma mère.
- Peux-tu me dire ma chère où laver ses slips sales ailleurs qu’en famille ? Chez des amis ? s’agaçait mon père. Décidément tu fais preuve d’une logique un peu particulière ma chère…
- Monsieur, s’enflammait ma mère, si vous vous occupiez des choses du ménage au lieu de courtiser les soubrettes, vous sauriez que ce sont les domestiques qui lavent notre linge sale. A l’office ! Et ta manie de dire "slips" chaque fois que tu le peux ! »

Après quoi, Mère se levait et quittait la table. Papa pouffait et m’invitait à ses côtés :
« J’ai toujours détesté cette table immense, disait-il, songeur, il faudrait des jumelles pour s’apercevoir. Bon, si nous passions directement au dessert ?»

Gênée de cette entorse à l’étiquette, je gloussais en hochant la tête.

Tout cela pour dire que je ne souhaite plus laver mes culottes sales sur ce blog familial.

Je ne vous cacherais pas que Framboise, par son attitude odieuse samedi soir, est en partie responsable de ma défection. Ma grand-tante Léontine (mon Dieu qu’elle est ridée ! Le soleil sans doute !) avec ses manières venimeuses non plus. Et Bertille qui est la plus gentille, est tellement excentrique et bruyante, je crains de ne pas vraiment la supporter.

La présence à mes côtés du charmant invité de Griotte, David, un de leur voisin si j’ai bien compris, n’a malheureusement pas compensé les réflexions mal-aimables que j’ai dû faire passer avec force Pouilly. De l’autre côté de la table, Côme me dévisageait d’un air interrogateur tandis que les autres riaient et plaisantaient à mes dépens.

J’ai tenté de calmer Framboise qui avait dû avaler quelque drogue avant notre arrivé :
« Voyons, Framboise, pourquoi m’as-tu demandé de participer à ton blog si tu n’éprouves aucune sympathie pour moi ?
- Pour te dévergonder, a-t-elle ricané bêtement. Et ça marche ! »

Après quelques vains échanges de ce type je me suis tue. Côme, sous la table caressait ma cuisse pour m’aider à me détendre.
Il est tellement gentil, mon cher mari !

C'était efficace puisque bientôt mon attention s’est focalisée sur sa main si habile. Elle glissait sous ma jupe, lentement, et je laissais de temps en temps échapper un soupir béat. De l’autre côté de la table mon époux ne laissait rien paraître de ce qui nous liait. L’air crispé, il tapotait nerveusement sur la nappe fleurie. Je lui fis un clin d’œil et il en profita pour glisser quelques doigts dans mon intimité. Je me raidis un peu et mon voisin de table me glissa à l’oreille : « Détendez-vous Avanie, voilà, comme ça, a-t-il susurré, tandis que je desserrais doucement les jambes… »

Soudain j’ai réalisé mon erreur.
J’ai manqué tomber de ma chaise et Côme a froncé les sourcils. Puis il a recommencé à tapoter la table… de ses dix doigts !

Les trois qui s’étaient immobilisés en moi n’étaient donc pas à lui… J’aurais voulu mourir sur place. David s’est alors adressé à moi, en chuchotant :
« J’aimerais vous prendre en photo avec Griotte et Framboise…
- Oui, prenez-moi ai-je répondu en haletant. »

Mais il a retiré sa main.
« Très bien, alors rendez-vous ce soir, a-t-il articulé avec une expression sadique... si vous voulez continuer ce jeu là en privé. »

Côme ne s’est pas fait prier pour rentrer avant le dessert. A la maison, c’était l’heure de la sieste.
« Côme, lui ai-je avoué en sanglotant, je ne suis pas assez bien pour toi.
Il a levé les yeux de son journal.
- Mais si très chère, vous êtes parfaite, sinon je ne vous aurais pas épousée.
J’ai insisté :
- Si vous saviez comme je suis méchante. Une très, très vilaine fille.
Mon ton de voix l’a surpris. Il a cessé de lire.

J’ai envoyé valser ses cours de la bourse. Et je me suis allongée sur ses genoux, cul nu. Ses lunettes ont dégringolé de son nez mais il n’a guère protesté.
- Fesse-moi, Côme, ai-je supplié, voilà tout ce que je mérite. »

Mais ce n’est pas tout ce que j’ai eu.

vendredi 11 juillet 2008

Toc, toc, toc

8 avis


Il fallait s’y attendre. Aucune des trois filles n’a daigné consacrer un peu de temps sur sa matinée du vendredi pour venir me prendre à l’aéroport. Avanie ne conduit plus depuis qu’elle s’est tout à fait décidée à remettre en question plus de deux millénaires de lutte féminine ; Bertille est on ne sait où ; quant à Framboise, dans son odieux langage, elle a dit quelque chose comme : « ça fait chier, Tata, t’as qu’à prendre le métro ».

Le métro ou la charrette à bœufs, c’est un peu la même chose, non ?

Tous ces gens mon Dieu, tous ces gens ; et de toutes allures, de toutes…classes ! Non, cette diversité là a été un grand choc pour moi. Je n’ai guère que 62 ans mes bambins ; on ne prend pas un dauphin qui a l’habitude de l’océan pour le jeter dans un étang d’eau douce… Quelques heures auparavant, je regardais la Grande Bleue de ma véranda corse (villa que je venais de vendre grâce au soutien merveilleux de Sampiero ; un villageois un peu bourru qui s’est enamouré de votre tante et qui s’est plié à toutes ses volontés, y compris les plus capricieuses, je dois bien l’avouer) et me voilà sans transition, plongée dans le grand bain bactérien de l’humanité. Imaginez donc !

A l’aéroport, Sampiero, le visage baigné de larmes – certaines personnes sont belles quand elles pleurent ; d’autres sont proprement dégoûtantes, comme un vieux mur qui s’écroule ; Sampiero a la larme digne, son visage carré est un masque de cire et son regard se perd dans un horizon qui n’existe pas…bon sang, quel homme ! – juste avant que je n’embarque, a insisté pour me refourguer un sanglier qu’il avait chassé le matin même. « Un sanglier, me suis-je écriée, ah, non, mon ami, vous n’allez pas mettre toute cette viande morte dans ma valise ».

- Un saucisson alors…de l’âne ?, a-t-il ajouté, en hurlant presque.
- Va pour un saucisson, mon ami, ai-je consenti.

Ce simple mot a suffi pour que des torrents de larme inondent son visage de nouveau. Quel homme. Le saucisson, Bertille le mangera bien… Sampiero, il m’oubliera…avec le temps, je deviendrai la plus belle photo jaunie de son album.

Qu'importe. Ma valise sous le bras, il m'a donc fallu partager cette chose à roulettes que l'on nomme Orlyval puis le métro. Heureusement, je n'ai pas eu à prendre le bus ou quelque chose de ce genre. Je ne sais si je dois vous le dire mais l'Orlyval ne sert pas qu'à transporter des familles qui retournent de voyage, mais aussi du personnel naviguant, des agents de comptoir encore en uniforme rentrant de leur journée de travail, et même des gens qui ne partent nulle part mais accompagnent seulement quelques gens de leur connaissance et s'en retournent. Et la 1ère classe n'existe plus... Quel monde est-ce là ?

Et je n'ai pas parlé de l'avion ; Grand Dieu, les avions ne sont plus ce qu'ils étaient ! Votre pauvre tante a dû partager sa rangée avec un petit garçon très mal élevé qui a vomi trois fois - trois fois ! - dans son sac à dos (allez lui faire comprendre que des petits sachets sont disposés à cet effet) ; croyez-vous que le personnel de l'avion eusse trouvé utile de venir aider ce pauvre enfant.

Mais il en faut davantage pour abattre une Léontine qui pourrait vous parler d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Je vous parle d'un temps où les shampooings n'étaient pas deux en un, d'un temps où le génie artistique était la norme, d'un temps où nous avions quelque respect pour notre propre langage...mais laissons cela, nous aurons l'occasion d'en reparler. C'est là précisément l'objet de ma participation à l'oeuvre familiale.

Une dernière chose. Framboise ne s'y attendait pas, mais je me suis rendue directement chez elle en sortant du métro. Ma valise saucisson sous le bras. Vous auriez vu sa tête. Elle ouvre la porte, nue comme un ver (quelle sorte d'épilation est-ce là ?), et un jeune homme passe derrière elle, pareillement, le membre apparemment encore en pleine forme.

Je n'ai pas pu m'empêcher de relever sa présence, j'en ai peur ! Le regardant...dans les yeux, j'ai dit : "quand vous en aurez fini avec Framboise, peut-être seriez vous disposé à visiter la mienne"... Bien sur, par égard pour Framboise, il a refusé. Mais je sais lire dans le regard des hommes où se nichent le désir et la passion.
Votre tante, mes enfants, malgré ses soixante-deux années reste une très jolie femme, capable de véritables prouesses. Les hommes de qualité le remarquent. Au premier coup d'oeil.

lundi 7 juillet 2008

Bertille se meuble

3 avis

Avanie a éclaté de rire quand je lui ai annoncé ça. Elle n'a pas su par où commencer :
"Ecoute, Bertille, c’est cocasse, aller à Ikéa ! Un trip suédois, je n’y aurais jamais pensé ! Il faut un début à tout ! (grincements de dents).
- Attends, Avanie, tu n'es jamais allée là-bas de ta vie ?
- Des meubles bon marché en pâte à bois, comme dans les films de Bergman... Je ne sais pas, la nurse est en congé, s'esquiva-t-elle...
- Aucun problème ! Pas besoin de nurse ! Il y a des garderies gratuites là bas ! Animés par des grands blonds tennismen, des bandeaux dans les cheveux ! Et des superbes piscines à balle, dis-je, dévisageant Aloysius, ce petit singe muet qui me tire la langue, avec peut-être des seringues de drogue dedans, tu pourras refaire votre vie après, Avanie !"

Victoire.

Karl nous conduisit dans la zone industrielle. Je vis Avanie à mes côtés se recroqueviller dans son siège.
"Va-t-il y avoir des émeutes, demande-elle ? Ne peut-on pas aller à Roche-Bobois, pour faire simple, même Habitat pourquoi pas ?"

Samedi après midi, il y avait le monde entier agglutiné chez les rois du contre-plaqué. Ce n'était pas possible, autant de monde, les gens doivent se sous-traiter pour être aussi nombreux ! Ils emploient des figurants !
"On se croirait dans le RER, répétait fébrilement Avanie.
- Mais vous prenez le RER, ma chère, demandais-je malicieusement ?
- Bien sûr que non, et en voici la raison évidente !"

A l'entrée, il y avait des petits appartements de démonstration, pour expliquer comment on peut se meubler du sol au plafond en IKEA. Des 80 mètres carrés jusqu'au studio de 5, avec un superbe lit-frigo-penderie-douche-fenêtre nommé Inkgijst Börkj (ce qui veut dire "Papillon de lumière" en suédois), et qui se prononce pareil si on passe le disque à l'envers.

Je répétais à Van, la tirant par la manche :
"regarde ! Comme ça doit être génial de vivre là dedans ! Le monde parfait ! Dis-donc, c'est surréaliste comme c'est bien rangé, aussi propre, c'est vraiment un truc qu'on voit jamais dans la vraie vie !"
Si, chez Avanie, en fait.

Elle n'a pas voulu laisser Al dans la piscine à balle. En fait, c'était plutôt une piscine à mioches. Il y en avait partout, en chaussettes qui puent, à se sauter à pieds joints sur la colonne vertébrale. "Comment pourrais-je laisser mon enfant dans ce marasme humain ?" Elle garda donc Aloysius contre elle, se frayant un chemin parmi la foule.

"Bertille, pourquoi autant de monde ? C'est incroyable, ils n'aiment tout de même pas vivre comme ça ?
- Chère Avanie, ce sont les soldes ! Les gens veulent faire des bonnes affaires !
- Mais pourquoi ne payent-ils pas plus cher, pour être plus tranquille, tout simplement ?"

J'ai levé les yeux au ciel sans rien ajouter. Je n'allais pas la contrarier. On ne sait jamais ce qui peut se produire, une fois à la caisse. Une CB qui ne marche pas, etc.

En bref :

Les cadres : accrochés au mur, les cadres contiennent de grandes images avec des couleurs toutes en noir et blanc, des visions de ports nordiques au matin, des montagnes plates, bref, des images qui donnent envie de tapisser sa chambre et de devenir social-démocrate.

L'objet super pas cher : il s'agit d'un objet banal (éponge, casserole, pince à linge, planche à découper) avec un design complètement dingue (en forme de pieuvre, de twingo, ou d'huitre de l'espace) et tellement pas cher qu'on en veut des centaines !
Exemple : "Regarde Avanie, quelle économie ! Une casserole, ça coute 50 euros, et ici, elle est à 1 euro ! Du coup, j'en ai pris cinquante !!!!"

Billy : L'étagère classique. Académique. Les romains avaient déjà les mêmes dans leurs temples. Le must du meuble d'étudiant fauché ou de l'ex-étudiant toujours fauché. Idéal pour empiler ma collection de "Femme inactuelle".

Les matelas Ikéa : pour prouver que c'est solide, ils ont inventé des robots qui se couchent et se lève toute la journée dessus, vingt fois par minutes. Du coup, les matelas sont solides, mais les robots fatigués.

La chambre d'enfant : le siège bleu, suspendu au plafond ! C'est tellement cromignon, le petit morpion qui se balance tel un pierrot lunaire, avec le plafond qui cède et le voisin du dessus qui tombe dans la chambre !

Sinon, j'ai chargé le chariot avec mon futur appartement dedans. On aurait dit un char d'assaut. Arrivée à la caisse, ma carte bancaire n'est pas passée. J'ai regardé Avanie avec une expression de chaton triste, d'un air glacial elle a sorti sa Siouper Visa, je lui ai dit :
"Je te rembourse ce soir ! Hein ? Avec un chèque (en bois) (en contre-plaqué) !"

De retour vers Karl qui s'était endormi après cinq heures dans la voiture, Avanie lui dit, pour se calmer les nerfs : "Karl, vous vous prenez pour un routier à dormir de la sorte ? Est-ce que je suis en train de chômer, moi ?"

samedi 5 juillet 2008

Les trépignements d'Avanie

28 avis

Cette semaine, je ne sais pourquoi, je me suis sentie très énervée.

Lundi, Bertille est arrivée, elle a entrepris de me « décoincer » un peu ; je ne sais pas ce qu’elle veut dire par là. En tant que cousine aînée, je me sens un peu responsable d’elle et j’ai passé de nombreuses heures en sa compagnie. Veiller seulement à ce qu’elle ne dise pas une grossièreté par phrase m’a épuisée.

Mardi, Côme a voulu que nous ayons un rapport sexuel. Je n’ai pas été habituée à ce qu’il me sollicite en pleine semaine et j’ai été incapable de me mettre en condition. Sa barbe de la journée m’arrachait les joues, il n’arrivait pas à dégrafer mon bustier et pour finir je me suis écriée : « Je suis désolée très cher mais je ne peux pas, débrouillez-vous tout seul ! » Je l’ai planté là et je suis allée dormir sur le canapé. Le lendemain, au petit-déjeuner, il a boudé comme un enfant.

Mercredi, Aloysius a eu la diarrhée toute la journée. Alors que j’avais rendez-vous pour un massage confort et bien-être à l’huile Relax chez Clarins j’ai passé la journée à me laver les mains enduites des étrons liquides de mon fils. Shana et moi n’osions pas nous regarder tandis que nous courrions aux quatre coins de la maison pour attraper des lingettes, des couches, des serpillières. Après le passage du médecin, à 18 heures, Aloysius s’est enfin endormi : j’avais les mains râpeuses et les nerfs en pelote. Shana m’a demandé sa soirée pour aller à un dîner avec Cindy. J’ai refusé sèchement et je suis allée me coucher sans attendre le retour de Côme.

Jeudi, j’ai pleuré toute la journée parce que Framboise, au téléphone, s’était encore moquée de Côme. Le soir, alors que j’avais senti tant de compassion pour lui dans mes larmes, j’ai pourtant ignoré les efforts de réconciliation de mon époux et j’ai regardé un Western à la télévision.

Vendredi, j’ai décidé de sauver mon couple et j’ai préparé le plat préféré de mon mari adoré. Nous avons bu du rosé et dîner aux chandelles. Avant de dormir, il m’a dispensé un long baiser délicieux (il s’était rasé pour épargner ma peau sensible) et nous nous sommes assoupis dans les bras l’un de l’autre.


RECETTE des PIEDS PAQUETS (pour 6 personnes) :
Une tripe de mouton et huit pieds (de mouton) soigneusement
nettoyés. Les pieds ont été flambés et blanchis.
Découper dans la tripe des carrés de sept ou huit centimètres
de côté et pratiquez une petite incision à l’un des coins.
Déposez au centre une cuillère de hachis (cent grammes de
petit salé avec deux gousses d’ail, du persil, un anchois et
du poivre). Replier chaque morceau en enfermant bien le
hachis. Faire passer la peau par l’incision et replier. On peut
aussi ficeler le paquet avec du fil (ce qui est plus facile).
Dans un plat en fonte, faire revenir un poireau et un oignon
émincé ; rajouter une carotte en tranches, trois tomates
hachées et un oignon piqué de deux clous de girofle.
Mouiller avec un litre de vin blanc et deux litres de bouillon.
Déposer d’abord les pieds au fond puis les paquets dessus
et faites bouillir.
Ajouter un bouquet garni, deux gousses d’ail écrasées, du
sel, du poivre, un piment oiseau et de l’écorce d’orange.
Recouvrir et laisser cuire doucement six à sept heures.

Coiffure : Nagi Noda

mardi 1 juillet 2008

Avanie arrache des dents

9 avis

Ayant passé la plus grande partie de ma vie dans un pensionnant dirigé par des bonnes-sœurs, en Suisse, j'ai appris que, bien entendu, mentir c'était mal.
Dieu l'a décrété, les bonnes-sœurs nous l'ont fait répéter en boucle, Mère me l'a rabâché. Soit.

Ainsi, pendant des années je me suis exercée à la sincérité.

J'annonçais, poliment :
"Mère, je trouve que vous avez grossi. Ou alors, c'est votre robe qui ne vous sied guère.
Mon père, ravi, s'écriait :
- Eusebia, écoutez votre fille puisque la vérité sort de la bouche des enfants !"

Mais mère me fusillait du regard et ne m'adressait plus la parole pendant trois jours.

De même, lorsque je répétais à la Mère Supérieure que mon père la surnommait "Le vieux chameau", je me voyais privée de récréation des semaines entières.

J'ai vite compris que la vérité devait parfois être passée sous silence.

Dans certains cas, il est même nécessaire de mentir, de vive voix.
Hélas. Que ceux qui ne sont pas d'accord prennent ma place, à la tête de quelques domestiques, mariée et mère, entourée de cousins aux mœurs légères.

Que dire lorsque mon époux, lors de notre nuit de noces, penaud, m'a demandé si j'étais déçue ?

J'ai protesté : "Côme adoré, pardonne mon silence mais je suis tellement comblée, au contraire, que je ne trouve de mots assez grands pour décrire ce que j'ai ressenti."

Le lendemain, il m'a offert un nouveau diamant.

J'ai eu, depuis quelques années que je suis devenue Madame de, l'occasion de parfaire mes réponses, prétextes et autres entorses à la vérité.

Toutefois, lorsque Shana, de retour, aujourd'hui, s'est enquise, des braises dans les yeux :
"Dites-moi que nous recommencerons, c'était délicieux... Je vous aime !

Je n'ai su que lui rétorquer :
- Je ne vois pas du tout de quoi vous voulez parler."

Puis je lui ai annoncé qu'Aloysius avait déjà émis une selle, au lever.




lundi 30 juin 2008

Bertille débarque

3 avis

Je rêve que je suis dans une fusée, avec mon casque énorme, qui contient tous mes cheveux. Je souris par le hublot, je m’installe dans le siège qui craque sous mon poids. Décollez jeunesse. La mise à feu, la fumée qui sort de partout, ça pétarade, mais ça reste sur place.

Allo la base nous avons un problème. C’est dommage, il y a eu des soviétiques et des américains et des chinois même des suisses dans l’espace, j’allais être la première représentante du peuple gros sur la lune. J’allais planter mon beau drapeau, arborant l’insigne de la baleine fringante.

Allo la base, il faut évacuer Bertille, la fusée ne peut pas décoller. Je sors, j’enlève mon casque, mes superbes cheveux esclaves des shampooings fous s’échappent du cou, et je vous emmerde.

J’arrive à Paris. A nous deux, ville lumière. Les portes du métro s’ouvrent, quand c’est l’heure de pointe, les moldus m’aperçoivent, ils se disent oh non, pas elle, on ne va jamais survivre. Ils se serrent les uns les autres, semblant me supplier du regard : on est quand même bourré à craquer là dedans, si on plus on doigt se taper des grosses. C’est la vie. Mais il y a les basiques, heureusement. Les seins, par exemple. Avant, tu as droit au trio infernal. Tu es jeune, grosse et plate, un comble. Tu ne t’en sors pas. Après, si tu as de la chance, il t’échoit une poitrine adéquate.

Ah, ce n’est pas les petits seins en forme de poire ou de cerise ou de datte qui frétillent tout seul, qui font leurs petits malins, non, c’est les outres, qu’il te faut corseter, dresser au cuir, disposer sur dans des cages blindées. La poitrine, décapotable, avec bien sûr le décolleté d’ogre qui mange le regard sans sommation. Pas de quartier, pas de prisonnier. Ça marche à tous les coups. C’est sorcier.

Par exemple, si le petit guichetier a la faiblesse de penser trois secondes : tiens voilà la grosse, quand je débarque, il se retrouve vite le nez au milieu des Zeppelins, il devient tout petit, il se trompe de mots, il balbutie. Il a les yeux harponnés par le paysage joyeux, doré et vallonné des nibards qui foisonnent devant lui. Il est à la limite de me demander l’autorisation de téter, le con. Et je pars. Il doit se dire, le guichetier, c’était juste une grosse, il secoue sa tête pour remettre ses idées en place, mais je suis sûre qu’il a du la sentir, la sève lui faire le tour du ventre.

J’ai rendez-vous avec Avanie. Framboise la surnomme la Princesse Charles, ou Lady Dry, ou Queen Kong, mais elle est tout à fait charmante. Comme je sors d’un pensionnat mi-soviétique, ça fait un peu pallier de décompression. Mais je suis sûre qu’elle est très sexe, cette cousine, au fond. Elégante, stricte, mince, elle est raide comme la justice, ce qui est sexe aussi, en soi. D’ailleurs, je lui ai dis pour briser la glace : Van, je suis sûre qu’on va faire les 400 couilles ensemble. Elle a rectifié : "les 400 coups, Bertille, voilà le nom exact du film. Ne te trompes pas, dans les conversations, tu pourrais passer pour une cruche." J’ai rigolé comme une otarie, secouée, je l’ai vu interloquée par mes seins champions du trampoline, interdite, les lèvres pincées.

Mannequin : Velvet dAmour

dimanche 29 juin 2008

Avanie marche fièrement

105 avis

J'étais tellement tendue ces dernières semaines que Côme m'a gentiment offert un peu de solitude et il est parti en week-end à Deauville avec Aloysius. J'ai versé quelques larmes en embrassant mon fils qui serrait son doudou contre lui mais une fois la porte refermée j'ai exécuté un série d'entrechats dans le hall d'entré. Puis, nue, j'ai sauté dans la piscine où j'ai nagé voluptueusement en rêvant aux longues heures de liberté qui s'annonçaient. Alors que je sortais de l'eau, une voix chaude m'a surprise et j'ai poussé un petit cri.

Shana en tenue de Carnaval, bardée de plumes, a éclaté de rire sans cesser de me détailler de la tête aux pieds. Pudiquement j'ai tenté de cacher à la fois mes seins et ma toison mais elle a ri de plus belle :
"Un si beau corps n'a pas été conçu pour se dissimuler !
Puis, sans gêne, elle a ajouté, rêveuse :
- Je n'avais jamais vu de vraie rousse...
Flattée en dépit de mon malaise, je me suis allongée sur une chaise longue, le plus loin possible de la nurse à plumes roses.
- Ai-je oublié de vous donner votre week-end ? ai-je demandé. Parce que je croyais être seule à la maison. C'est pour cela que...
- Excusez-moi, a répondu Shana en détournant enfin les yeux, mais j'avais oublié mon étendard. D'ailleurs Cindy m'attend en bas, elle est furieuse, nous sommes en retard, je vais me dépêcher.
Mais elle n'a pas esquissé le moindre mouvement.

- De quoi s'agit-il ? Il y a un Carnaval quelquepart ?
Shana a souri et j'ai presque regretté de ne pas entendre encore une fois son rire crystallin :
- Mais non, c'est la Marche des Fiertés aujourd'hui, la Gay Pride quoi !
Elle a saisi sa banderolle et l'a dépliée avec un tadam triomphant. Il était écrit en lettres argentées : "Lesbiennes et fières de l'être".
J'ai rougi et j'ai articulé :
- Vous ne devriez pas tarder plus longtemps, votre amie doit s'inquiéter.

Tandis qu'elle s'en allait je me suis allongée à plat ventre.
J'étais un peu troublée. Avais-je bien vu ? Shana portait-elle un string sous sa jupette de plumes ? Comme toutes les filles, j'avais eu des amitiés passionnelles à l'adolescence et plusieurs fois mes sentiments m'avaient incité à des rêveries illicites. Mais jamais je n'avais connu de femme qui aime les femmes. Shana était si belle, son corps si sensuel...

Alors que je somnolais, bercée par le balancement des arbres sur la terrasse, quelqu'un a toussé, près de moi. D'un bond je me suis mise debout.
C'était Shana, de retour avec son rire délicieux :
- Cindy est partie, dit-elle, sans avoir l'air déçue. Mais j'ai eu une idée : et si vous m'accompagniez ? J'ai besoin de quelqu'un pour tenir l'autre côté de la bannière.

J'ai refusé catégoriquement en me rallongeant sur la chaise longue mais Shana s'est enquise :
-J'espère que vous avez mis de la crème solaire, votre peau est si claire !
Comme je secouais la tête, elle a saisi le tube qui était à nos pieds et elle a entrepris de me protéger du soleil... Ses mains étaient brûlantes et voluptueuses. De temps en temps, elles s'attardaient, leur pression devenait bouleversante.

- Que vous êtes tendue ! Je vais vous masser, a-t-elle soufflé dans mon oreille.


Shana avait raison, après son massage, j'ai pu danser dans les rues de Paris jusqu'au bout de la nuit. Je me sentais aussi légères que les plumes roses qu'elle avait partagé avec moi... Ainsi parée, je savais que j'étais, comme une danseuse du Crazy Horse, abominablement sexy.

Si Côme m'avait vue !

Photos : Dita Von Teese au Crazy Horse
et Gérard Rancinan

dimanche 22 juin 2008

Avanie nage en eaux troubles

6 avis

Qu'on se figure que je n'ai jamais vu la scène de Loft Story où Loana, dans la piscine, se donne à Jean-Edouard.


C'est drôle mais c'est ce soir-là que Côme m'a demandée en mariage. Nous étions au Ritz, tandis que la France entière avait les yeux rivés sur la première émission de télé-réalité française.

Le lendemain, émue, j'ai appelé plusieurs amis pour leur annoncer la nouvelle de mon bonheur tout neuf. J'avais à peine fini de dire bonjour que chacun se mettait à hurler : "Tu as vu ça, hier ? C'est dingue ! Dans la piscine, avec les caméras, etc."
Impossible de placer une parole.

Je crois qu'après cinq appels de ce style, j'ai décidé de laisser passer quelques jours avant de parler de la fin de mon célibat. A la place, j'ai allumé la télévision. Dans le loft, il ne se passait rien...

Et puis, hier, j'ai repensé brusquement à Loana.
Nous étions seuls dans la piscine, sur notre terrasse. Aloysius dormait dans sa chambre. Au loin, la Tour Eiffel chatouillait les nuages. Les domestiques avaient regagné leur domicile. Adossée au bord, je sentais un jet d'eau troublant passer entre mes cuisses. Tout à coup, mon époux bien-aimé a mordu un de mes mollets sous l'eau. Je ne sais si c'était la chaleur pesante de l'air ce jour-là mais je me sentais toute chose.

Je me suis mise à rire bêtement et Côme, encouragé, s'est écrié : "je suis le grand requin blanc !
Avec un sourire niais j'ai répondu "quelle queue gigantesque ! " (je parlais bien-sûr de la queue du requin, n'allez pas vous imaginer que...) et Côme a arraché mon bikini.

Le bord de la piscine griffait mon dos sous les puissants assauts de mon mari, le jet d'eau caressait nos sexes emboités et nous avons pris un plaisir inouï.

Un peu plus tard, alors que Côme m'étalait une crème cicatrisante dans le dos je lui ai demandé :
"Tu crois que Loana et Jean-Edouard sont toujours ensemble aujourd'hui ?"

Il n'en savait rien.

Avanie cuisine (pour) Framboise

9 avis

Framboise a enfin accepté de déjeuner à la maison.

Il y a deux semaines que je tentais de la faire venir afin de lui exposer mon nouvel arrivage de robes Dona Karan. Et, surtout, je le confesse, je mourrais d’envie de rencontrer Baptiste, son fiancé.

Alors, lorsqu’elle a accepté de partager, en couple, notre barbecue dominical sur la terrasse, j’ai aussitôt envoyé la bonne acheter des côtes de bœuf chez le boucher tandis que je passais commande de macarons chez Ladurée.

« Bapt est tellement viril, avait hurlé ma cousine dans le combiné, il a des mains larges comme des pelles ! Le poil de sa barbe est si dru que quand il m’embrasse ça me fait un peeling à moindres frais. Je l’adoooooooooore ! C’est l’homme de ma vie !»

La côte de bœuf m’a semblée être le plat idéal pour un homme qui a des membres de géant.


Enfin je ne parle pas de…


(Framboise n’a pas encore abordé le sujet mais je présume que…)


Mais ça ne vous regarde pas, dites donc !

Toujours est-il, que juste après le départ de l’aide cuisine, Framboise m’a rappelée :
« Au fait, tu vas faire quoi à manger ?
- Pourquoi ? ai-je demandé, méfiante.
- Et bien, Baptiste est un petit peu compliqué. Enfin, il prend soin de sa santé et de son corps, tu comprends. Il préfère les aliments bio.

J’ai soupiré.
- Ne te plains pas, parce qu’il sort d’une période macrobiotique et là c’était l’enfer, je m’y perdais complètement.
- Ce n’est pas grave, Framboise, ai-je tempéré – car sa voix devenait suraiguë – il y a un magasin Naturalia près de la maison, on va bien trouver de quoi lui concocter un repas. Ils ont souvent du poisson. Il aime le poisson ?
- Oui. Mais... Avanie... il y a autre chose à prendre en compte…
- Ah bon ? Quoi ?
- Tu ne te moques pas de moi ? Hein ? Promis ?
- Je le promets mais je ne vois pas…
- Je suis au régime !

J’ai hurlé de rire dans le téléphone.

Framboise a protesté, boudeuse :
- Tu avais promis.
- Mais tu es mince comme une crevette ! Ou plutôt comme une arête de crevette.
- Avanie !
- Qu’est-ce qui se passe ? Ta minijupe préférée a rétréci au lavage et cela t’a rempli de doutes ?
- Avanie !
- Oui ?
- Les crevettes n’ont pas d’arêtes !
- Tu es sûre ?
- Et j’ai vu l’ex de Baptiste. Le genre Kate Moss mais en mieux.
- Mais Framboise, tu es mille fois plus belle que Kate Moss.
- Non. L’autre jour, à la loupe, j’ai regardé mes cuisses et j’ai vu un millimètre carré de peau suspect. Du genre capitonné.
- J’aimerais bien voir ça, ai-je dit ironique.

Mais Framboise a susurré :
- Allez Avanie, sois chic, promets de me concocter un repas light !

Et comme je ne peux pas lui résister, voici ce que la cuisinière a préparé :

En entrée, un petit assortiment de verrines.

Et, en plat principal, un carpaccio de bar aux mangues

Ingrédients pour 4 personnes

400 g de filets de bar
1 mangue mûre à point
poivre noir fraîchement moulu
huile d'olive
gros sel
Préparation

Coupez les filets de bar en fines tranches. Pelez et coupez la mangue de la même manière.

Disposer dans une assiette huilée, puis arroser de 2 à 3 cuillères d'huile. Saler et poivrer. Laisser mariner au moins 30 minutes avant de servir.



Malheureusement, Baptiste n'est pas venu. Framboise avait oublié que c'était le jour de son tournoi de tennis annuel :

- J'adore le regarder jouer. Il pousse de "han" à faire rougir toute autre fille que moi.

Puis, au dessert, Framboise m'a avoué que ce que j'avais imaginé était vrai. Baptiste n'a pas seulement de grandes mains...

vendredi 20 juin 2008

Avanie coache Bertille

4 avis

A minuit dix, hier, Côme m’a secouée. J’ai ôté mon masque pour les yeux , mes boules Quiès et un mot tel que « Gueu » a franchi ma bouche desséchée par le sommeil. Sur ma tête, la fourrure rose de ma nuisette formait un curieux panache.
Côme me dévisageait d’un air furieux.

« Que se passe-t-il ? ai-je baillé
- Ton cousin Calixte est au téléphone. Il souhaite te parler.
- Mais enfin Côme, ai-je protesté, tu aurais pu lui dire que...
- Figure-toi ma chère, que, bien entendu, je lui ai demandé de rappeler à une heure raisonnable. Je l'ai également informé du fait que nous avions sombré tous deux dans un sommeil réparateur mérité. Pourtant, il s'est obstiné. Il paraît que l'affaire est de la plus haute importance. Alors, au dixième coup de téléphone, je te réveille et je te somme d'aller lui répondre. Merci !

Je me suis donc extirpée de mes rêves et, adossée ma pile d'oreillers, j'ai articulé un allo peu amène.
- Ah ! Douce cousine, a vitupéré un Calixte éméché. Alors, raconte-moi, tu dors en quelle tenue ? Un pyjama en pilou-pilou de chez Calvin Klein ?
J'ai gloussé :
-Mon pauvre cousin, décidément tu ne me connais guère ! Figure-toi que je porte une nuisette rose transparen...

Ma phrase est restée suspendue, crucifiée aux quatre coins par les regards assassins de mon époux.

- Je veux dire : mais qu'est-ce qui te prend de nous déranger à cette heure indue ? Enfin Calixte !
- Bon, c'était pour te prévenir que Bertille allait bientôt prendre le train. Elle arrivera de Suisse vers sept heures du matin. Si tu pouvais aller la cueillir.
- Mais qui est cette Bertille, je ne connais pas cette...
- Rhhooo Avanie, détends-toi un peu, relax ! Cette jeune fille de bonne famille est la sœur de mon cousin Estèphe. Elle vient de claquer la porte de son pensionnat pour tenter l'aventure à Paris. J'ai promis à ses parents que tu te chargerais de la remettre dans le droit chemin.
- Moi ? Mais je...
- Oui toi ! J'ai pensé que tu alliais des qualités de diplomates et un goût indéniable en matière de mode. Bertille a besoin d'une garde-robe si elle veut se lancer dans le monde du travail.

Je rougis. Ainsi Calixte m'adressait des compliments ! Je n'en revenais pas :
- Alors ça roule jeunesse ?
- Euh, bon je crois que...
- Super ! a-t-il hurlé dans le combiné. Bon adjugé vendu ! Merci, bye bye ! Ah et je te préviens quand même, ça ne va pas être une mince affaire.
Avant qu'il ne raccroche j'ai entendu une foule éclater de rire avec lui. Il m'a semblé reconnaître les éclats hystériques de Framboise mais je n'en suis pas certaine.

J'avais oublié Côme. Il a saisi le téléphone qu'il est allé reposer sur son socle et il a dit :
- J'ai rêvé, ou, en ma présence, tu as flirté avec ton cousin ?
- QU'EST-CE QUE TU DIS ? J'AI REMIS MES BOULES QUIES ? ai-je prétendu.
Côme m'a tourné le dos, furieux, et il s'est rendormi aussitôt.

C'est Karl qui nous a ramené Bertille, vers midi. "Elle a tenu à visiter la ville, m'a-t-il expliqué". Comme je fronçais les sourcils, il m'a expliqué : "Elle n'est pas facile à contredire vous verrez !"

Puis, Bertille a surgi dans le salon. Comment la décrire ? Par où commencer ? Tout, chez elle, est gigantesque. Elle doit mesurer un mètre quatre vingt et peser une centaine de kilos. Ses cheveux sont immenses et volumineux. Sa voix tonitruante. Sa bonne humeur communicative. Ses colères phénoménales.

Je lui ai proposé d'aller faire un tour Avenue Montaigne et elle a refusé, prétextant que ni Chanel ni Dior n'avait de tenues dans sa taille.
- Et puis, ce que je veux d'abord, ce sont des sous-vêtements. Avanie, je sais ce qu'il faut faire : Cherchons sur internet, il paraît que tu es une experte en informatique.
J'ai protesté mais Bertille ne m'a pas entendue. Elle n'arrêtait pas de parler.
- Mère et Père croient que je ne sais pas quoi faire dans la vie. C'est faux ! Je veux être mannequin !
Là, je vous l'avoue, j'ai craché mon infusion sur l'écran d'ordinateur et j'ai laché ma tasse par terre.
- Ma petite Bertille, ai-je commencé en me frottant les mains, comment dire ?

La demoiselle, imperturbable, a tapé sur mes mains et a poursuivi :
-Un mannequin grande taille, tu t'en doutes ! J'ai rencontré un photographe, il me veut dans son agence... Tu le connais peut-être ?
- Euh ça...
- Il s'appelle Massimiliano, un truc comme ça.
- Ah et..
- Ouais il est beau, magnifique, il m'a déjà fait faire quelques photos mais il voudrait voir comment je suis, enfin tu vois quoi, en petite tenue !
- Je ne crois p...
- Alors voyons voir ce qu'il y a sur le web !

Après quelques clics, Bertille avait jeté son dévolu sur plusieurs tenues suggestives.

Elle n'a même pas accepté de prendre au moins quelques sous-vêtements pour le quotidien. Des choses sobres et élégantes qui lui permettraient de porter un tailleur avec élégance :

Alors que je tentais de la convaincre de saisir une délicieuse robe bleue-marine, Bertille m'a regardé dans les yeux :
- Avanie, ma chéri, je n'ai que dix-huit ans mais je suis plus avertie que toi, il me semble. Il n'y a qu'une chose qui compte dans la vie, c'est le sexe... L'amour, si tu veux. C'est ce que m'a dit Massimilianio et je suis d'accord avec lui ! Crois-moi, je ne vais pas me transformer en bonne-sœur, j'en ai assez vu au pensionnat !

J'ai fondu en larmes.

Alors que je tentais de me justifier, Bertille m'a serrée contre son opulente poitrine :
- Tu sais, Van, il n'est pas trop tard pour changer de vie. Quitte ton mari et viens avec moi, je suis sûre que Massimiliano voudra t'embaucher aussi, tu es encore bien pour ton âge !

Mes sanglots ont redoublé et je l'ai raccompagnée à la porte.

Deux jours plus tard, j'ai reçu les photos de Bertille. Avec un petit mot :

"Il m'a dit de faire l'amour à son appareil photo, j'espère que tu ne seras pas choquée ! Et, au fait, il attend ton coup de fil !"

Je l'ai trouvé somptueuse...














Mannequin : Velvet

samedi 14 juin 2008

Avanie se met aux fourneaux

3 avis

La nouvelle nurse est parfaite. D’abord Aloysius l’adore J’avoue que parfois, je suis un peu vexée, parce qu’en plein dans une activité passionnante telle que le coloriage ou le collage de gommettes, Aloysius se met à réclamer « Shana, veux Shana ! ».

Mais s’il faut subir ça et en échange profiter des services d’une nurse juste excellent, eh bien, ainsi ferons-nous.

Au début, je me suis dit « Non, pas question ! » Shana a 52 ans mais elle en fait 35 à tout casser. Elle portait une minijupe en jean avec des bottes. En guise de haut, elle arborait un gilet qui laissait voir son nombril (sans piercing, heureusement !) et le haut d’une poitrine siliconée. J’allais lui demander de rentrer chez elle sans tarder, on ne sait jamais, elle aurait pu prendre froid lorsqu’elle s’est adressée à Aloysius. En quelques mots, elle l’a charmé, lui qui, d’habitude, reste sur sa réserve. En dix, je l’embauchais : elle venait de m’apprendre qu’elle n’aimait qu'elle était gouine.

Aujourd’hui, Shana avait prévu de faire un peu de cuisine avec mon fils : « Quelque chose de très simple, m’a-t-elle dit, lorsque je l’ai regardé avec un froncement de sourcils. Et puis, les hommes ne font pas assez la cuisine a t-elle ajouté. »

Je n’ai rien dit, étant donné que chez moi, les femmes ne la font pas non plus, sauf inspiration soudaine. Nous laissons le quotidien entre les mains de nos domestiques. Mais je me suis souvenue des talents culinaires de Calixte, et il semblerait que ceux-ci rendent son charme plus efficace encore… Donc, j’ai approuvé !

De toutes façons, j’avais rendez-vous avec mon esthéticienne (je rassure Le Sushi, il ne s’agissait pas cette fois d’épilation mais de manucure.) et avec mon coiffeur, le divin Giorgio… Alors.

J’allais partir lorsque Shana m’a alpaguée dans le hall d’entrée. Elle était en larmes. « Mon amie Cindy vient de se faire renverser par un Vélib. Il faut que je file ! »

Et elle a claqué la porte.

Dans la cuisine tout était prêt :

120 grammes de sucre
150 grammes de farine
1 pincée de sel
1 sachet de levure
75 grammes de beurre
4 œufs
1 sachet de sucre vanillé
le jus d’un citron, quelques zestes.

Mais pas de recette.
Alors nous avons tout mélangé. Aloysius s’est fait une joie de verser les ingrédients dans le grand saladier prévu à cet effet. Il a renversé un peu de tout sur ses habits et les miens, mais il était tellement ravi que je n’ai pas eu le cœur de le lui reprocher. J’ai remué énergiquement. Nous avons versé le tout dans 8 petits moules à madeleines… Et voilà !



Par contre, mes mains sont hideuses et je frise !

vendredi 6 juin 2008

Avanie se dépoile

11 avis

Pour notre anniversaire de mariage je cherchais une idée originale afin de gâter mon mari. Ce n'est pas chose évidente car Côme n'a besoin de rien et ce qu'il lui arrive de désirer, il se l'achète lui-même, dans la seconde.

Pourtant lorsque j'ai avoué à Framboise que j'allais sans doute lui choisir une énième cravate de soie, elle me supplia de lui rendre visite. Elle a dû insister un peu car, d'habitude, je ne quitte Paris que par des vols longs courriers mais finalement j'ai réquisitionné Karl afin de rejoindre la ville provinciale où se terre une partie de ma famille.

Framboise m'a entrainée dans une débauche de shopping. Pour nous. J'ai été agréablement surprise des possibilités de dépense qu'offrait une petite ville comme R. Mais lorsque le coffre de la voiture a été rempli de sacs, j'ai réalisé que je n'avais toujours rien trouvé pour mon époux.
"Framboise, me suis-je écriée, c'est une catastrophe : je suis égoïste. Je me suis achetée une dizaine de robes, des bijoux et des chaussures et je n'ai pas la moindre idée de ce qui pourrait faire plaisir à Côme !
- Oh Avanie, ne t'inquiète donc pas. Tiens essaie plutôt ce bikini.
- Tu es sûre Framboise ? Tu me promets que tu m'aideras ensuite ?
- Oui ! Aaaaaaaaaah ! a-t-elle hurlé soudain.
- Qu'est-ce qu'il y a je t'ai marché sur le pied ? Je n'ai rien senti.
- Là ! là ! criait-elle en désignant la culotte de bikini que je venais de passer.
Je me suis mise à hurler aussi imaginant qu'elle avait vu un insecte.

Une grosse voix se fit entendre derrière le rideau.
- Que se passe-t-il mesdames, je suis le responsable de la surveillance, puis-je vous aider ?
Framboise et moi nous sommes tues d'un coup.
- Non, ça ira, pouffa ma cousine
Elle ajouta tout bas.
- Jolie moustache !
-Tu le vois ? ai-je demandé, en me cachant les seins de mes mains.
- Non je parlais de la tienne.

Du doigt, elle pointait les trois poils qui dépassaient de mon maillot de bain.

- Oh tu exagères Framboise, c'est juste que...
- Enlève, m'a-t-elle ordonné.
- Mais pourquoi... enfin... euh.
Elle s'est précipité sur moi et m'a ôté le slip avec les dents.
- Moi Jane toi Tarzan s'est-elle moquée.
J'ai rougi.
- Je sais ce que tu vas offrir à Côme, a-t-elle vociféré.
Là, le vigile décida d'en avoir le cœur net et il ouvrit le rideau. Sa mine féroce s'est adoucie en me voyant nue.
- Excusez-moi mesdemoiselles mais j'ai cru qu'on vous agressait, s'est-il justifié.
- OK, a répondu Framboise en se déshabillant. Non, c'est bon on essaie juste des bikinis. Tiens vous pouvez m'aider à agrafer le soutien-gorge de celui-ci.
Le colosse est entré dans la cabine et j'ai retrouvé mes esprits.
- Mais enfin monsieur, sortez d'ici ! C'est incroyable !
- Excusez-la, a susurré Framboise, elle n'a pas encore aperçu vos pectoraux.
Puis, sans gêne aucune elle s'est adressée à moi :
- Tu connais l'épilation américaine ? Non ? Tu vas adorer... Et Côme aussi, tu verras.
- C'est quoi l'épilation américaine ? a voulu savoir le vigile ?"

Une heure plus tard, je ressemblais à ça :







Et Côme, en effet, a beaucoup apprécié...

vendredi 30 mai 2008

Avanie contre le New Jersey Devil 2

4 avis

J’ai enfin osé demandé ce qui se passait. Courant derrière Harlan, j’ai exprimé ma soif d’aider cette famille à résoudre le problème qui se posait. Son épouse dans les bras, l’écrivain s’est retourné si vivement que j’ai sursauté :


« Il ne s’agit pas d’un problème mais d’un enlèvement. Notre fils Tod a disparu ! La nurse l’a laissé 5 minutes pour aller aux toilettes. Il dormait dans son lit à barreaux, avec son doudou Nono … Quand elle est revenu il avait disparu. Vous avez vu dans quel état nous avons trouvé Nono ? Nous avons des raisons de craindre le pire pour notre fils. Maintenant laissez-moi, je vais appeler un agent du FBI avec qui j’ai travaillé récemment sur un de mes livres.
- Vous voulez parler de The innocent ? ai-je tenté, émue de mon audace. »

Mais il est entré dans une chambre et en a refermé la porte. Je me suis assise piteusement sur un fauteuil dans le couloir. Pendant quelques minutes j’ai laissé ma pensée vagabonder, imaginant en un éclair ce qui se passerait si nous ne retrouvions pas l’enfant. En tant qu’étrangère, soudainement arrivée dans la maison, n’allait-on pas me soupçonner ? Je me voyais déjà dans une salle d’interrogatoire avec un gentil et un méchant policier. Le gentil me complimenterait sur mon élégance : « La tenue orange de condamné à mort vous sied à ravir ! » tandis que son collègue me ferait remarquer que sans maquillage je parais plus que mon âge. J’ai réprimé un sanglot et me suis levée d’un bond. La seule solution c’était de retrouver Ted… Tad… Tod. Enfin le bébé !

J’ai décidé d’aller demander de l’aide au garçon dans la bibliothèque. Vus ses goûts littéraires, il devait s’y connaître un peu en enlèvement.

Mais au moment où je descendais les marches un autre cri s’est fait entendre dans la chambre où Harlan venait de s’enfermer. Cette fois, il s’agissait d’une voix masculine. Je me suis ruée contre la porte.
Comme elle résistait, j’ai saisi un vase chinois sur une console et je l’ai propulsé sur la poignée : elle a cédé. J’ai avancé précautionneusement sur la porcelaine et je suis entrée dans la chambre. Madame Coben semblait dormir sur un lit rond très kitsch ; Harlan me dévisageait, interloqué. Alors que je m’apprêtais à lui faire mes excuses pour le vase et la porte il m’expliqua : « Je viens de recevoir un mail. Avec une photo de mon fils Tod. »
Abattu, il me laissa la place devant l’ordinateur et je regardai le mail ouvert. Un enfant, qui ressemblait beaucoup à celui que j’avais vu au rez-de-chaussée, faisait de la balançoire et il riait :
« Au moins, ai-je tenté, il a l’air heureux là où… »

Harlan se mit à pleurer doucement. Gênée, je lui tapotais dans le dos. Au bout de quelques secondes, il m’empoigna par les épaules et nicha sa tête contre ma poitrine. Je lui caressais la tête, tout en tentant de garder une distance décente. Mon chemisier se couvrait de larmes, de morve et de salive.
« Euh, écoutez Harlan, prenons les choses en main. Vous ne deviez pas appeler quelqu’un du FBI ?
- Il refuse de me prendre en ligne. On me dit qu’il est entrain de réaliser un interrogatoire.
Il sanglota de plus belle.
- C’est que ça doit être vrai… Avez-vous fait un tour dans les environs ?
- Oui ! Mon chauffeur continue.
- Ecoutez lâchez-moi, je retourne voir en bas, ai-je demandé poliment mais fermement.

Il a obtempéré, l’air un peu déçu. Je me suis aperçue dans une psyché qui trônait au pied du lit et j’avais l’air d’être passée dans une essoreuse. Mais, pour une fois, ce n’était pas mon souci principal. Je suis descendue au salon. Du fauteuil s’est élevée une voix espiègle.

« Alors, vous l’avez trouvé ?
- Et bien non ! Je venais te voir pour savoir si tu n’avais pas une idée . Ton père n’est plus en état de diriger l’enquête. Il a reçu un mail fort menaçant avec une photo de ton frère sur une balançoire.
L’enfant leva un sourcil, l’air soudain intéressé.
- Ah bon ? Qu’est-ce qu’il disait le mail ?
Je me rendis compte que je n’avais pas remarqué de texte d’accompagnement.
- Euh !
- Il ne faut négliger aucun détail, Avanie ! m’a-t-il tancée. Je parie que vous n’avez même pas regardé le nom de l’expéditeur.
- Non… Mais…
- Pffff a soupiré le freluquet.
- Je te prie de rester poli, jeune homme, ai-je tenté.
- Nous avons des choses plus importantes sur la planche a-t-il rétorqué du tac au tac. Alors qu’avez-vous comme preuves ?
- Et bien ton frère faisait la sieste quand la nurse s’est absentée… A son retour il n’était plus dans son lit….
Je réfléchissais en même temps que je parlais :
- Et son doudou était pendu dans sa chambre.
- Ah ! dit-il, c’est pour ça que ma mère a hurlé ? Bon je vais aller les aider.

Il s’est extirpé du fauteuil de mauvaise grâce, posant son livre ouvert, à cheval sur l’accoudoir.
- Merci, ai-je murmuré. Au fait tu t’appelles comment ?
- Tod…
- Quoi ? Tod ? mais c’est toi que l’on cherche partout !

Folle de joie je me suis mise à hurler :
- Il est là, il est là, je l’ai retrouvé !

Aussitôt la troupe au grand complet a pénétré dans la pièce où nous étions. Harlan et sa femme pleurait en serrant l’enfant boudeur dans leurs bras. Aglaé se mouchait dans son tablier et le chauffeur se raclait la gorge.

J’ai regardé ma montre et vu que l’heure de mon vol approchait :
« Harlan, ai-je glissé, je suis tellement heureuse de ce dénouement… Maintenant pourrions-nous comme convenu…
- Je suis désolé, Mademoiselle, me répondit, l’auteur, mais cette aventure m’a inspiré. Il faut que j’aille écrire tout de suite ! Revenez demain…

Tod se pencha vers moi :
- Je vous le déconseille, c’est quasiment tous les jours comme ça ! »

FIN

jeudi 29 mai 2008

Avanie contre le New Jersey Devil. Part.1

3 avis

En début de semaine, juste après avoir dévoré le dernier poche de Harlan Coben, Innocent, j’ai décidé d’aller rencontrer l’auteur dans le New Jersey.
Côme avait une réunion à New York, j’ai proposé de l’accompagner. Pendant sa journée de travail, j’ai pris un vol pour le New Jersey. Aloysius est resté avec une jeune fille française qui avait été recrutée directement par le Carlyle.

J’avais peu dormi pendant notre vol de la veille. Et Aloysius avait refusé de s’allonger avant l’aube dans notre suite. Aussi, dans la voiture envoyée par le maître du suspense, je me suis endormie dès le démarrage ou quasiment. Deux heures plus tard, j’ai ouvert un œil, échevelée, bouche ouverte. Mon col était empreint de bave. Heureusement j’étais seule. Le chauffeur, par délicatesse, s’était éclipsé. Je me suis recoiffée devant le rétroviseur et je suis sortie, les jambes flageolantes.

La demeure était impressionnante, quelque peu lugubre à mon avis et le parc curieusement sauvage. Un frisson m’a parcourue tandis que j’ai entrepris de pousser la porte d’entrée après quelques vains coups de sonnette. Mais l’agitation qui régnait dans le hall d’entrée me rassura. Enfin pour peu de temps.

Plusieurs personnes s’agitaient courant sur le sol marbré : des domestiques, une nurse en larmes, Mme Coben, très blonde, sanglée dans un tailleur marron de dame campagnarde, des enfants, plusieurs chiens. Au centre de l’action, un géant chauve de deux mètres tapa dans ses mains ; c’était Harlan, mais j’ai senti que ce n’était pas le moment de me présenter :

« Restons calmes, ordonna-t-il. Nous allons nous répartir les recherches. Aglaé, vous irez au premier étage, les enfants et toi Linda, vous vous occuperez du deuxième étage et de la salle de jeux. Doug et moi irons au jardin avec les chiens. Je vais appeler les voisins et mon ami Ted, le sherif, au cas où. »
Soudain il m’aperçut :
« Et vous, Mademoiselle, vous parcourrez le rez-de-chaussée !
Il s’adressa à l’assemblée :
- Tout est OK ? Alors go ! »

Je ne savais pas vraiment quoi chercher. Je me suis avancée dans le salon orné d’une immense et massive bibliothèque. Tous ces livres, ai-je songé, ce n’est pas très hygiénique ! Je me forçais à enregistrer le moindre détail au cas où il s’agisse de ce qu’il fallait retrouver. Puis je me suis rappelée qu’il avait parlé d’alerter les voisins, le shérif.
De quoi pouvait-il donc s’agir ?
« Qui t’es toi ? me demanda tout à coup un enfant dissimulé par un immense fauteuil.
- Euh mon nom est Avanie, articulai-je, la bouche sèche. Et toi ? Tu ne cherches pas avec les autres ?
- Oh non ! je préfère lire.
Il avait 3 ans à peine !
- Ah bon ? et que lis-tu en ce moment ?
- Je viens de finir The mystery of the green ghost, c’était pas mal. Moins bien, toutefois, que le dernier livre de mon père. Vous l’avez lu ?
- The innocent ? Oui bien sûr c’est pour ça que je suis là… Mais je n’ai pas pu parler à ton père…. »

A ce moment, un long cri résonna dans les escaliers. Je m’élançai dans le hall et grimpai au premier étage quatre à quatre. Au centre d’une chambre d’enfant, un doudou se balançait doucement, pendu au bout d’une cordelette :

« c’est Nono hurlait Mme Coben, c’est son Nono ! Mon dieu je suis sûre qu’on nous l’a enlevé ! »

Elle s’évanouit alors que son mari franchissait la porte. Il la rattrapa dans ses bras de rugbyman et la souleva comme une plume.

A suivre…

mardi 27 mai 2008

Comment faire porter le chapeau à ses domestiques ?

4 avis

Lorsque je suis rentrée saoule de chez Anna Gavalda, Côme n’en fut pas très heureux. Il aurait, certes, pu l’ignorer si je ne m’étais pas jetée sur lui, alors qu’il dormait, forçant sa bouche de ma langue avinée. Je n’y peux rien, l’alcool libère mes hormones les plus agressives sexuellement.

Côme a d’abord protesté, puis, alors qu’il répondait à mon étreinte de la manière virile qui est la sienne, j’ai éructé. D’un bond, je me suis dégagée et j'ai crapahuté, titubant quelque peu, jusqu’aux toilettes, les deux mains appliquées sur ma bouche.

Côme, inquiet a surgi derrière moi, au moment où je me mettais à vomir.

Entre deux salves nauséabondes, j’ai réussi à tout lui expliquer :
«Côme, très cher, que cela reste entre nous mais Maria-Magdalena buvait tellement ce soir que j’ai dû boire de concert. Qu’aurait pensé Madame Gavalda si elle avait constaté, qu’en ma sobre présence, une domestique osait se griser ? »

Côme admit à contrecœur cette raison farfelue.
Mais il admit.


Lorsqu’en compagnie de son directeur qui venait dîner, Côme a découvert Aloysius les fesses à l’air dans le hall d’entrée, s’amusant à marcher dans son pipi, j’ai réagi en accordant mes cris aux siens. Mon très cher mari ignorait que ce jour là la nurse avait demandé sa journée. Framboise qui émergea du dressing où nous faisions les essayages de nos emplettes du jour a failli protester en m’entendant accuser Juliette de ma négligence. Mais elle a compris et elle m’a aidée.
« Cette Juliette est une vraie ogresse, a-t-elle dit. Vous devriez la virer ! »
Côme admit donc, et il donna son congé, à mon grand regret, à notre nurse. Mais que pouvais-je faire ?


Lorsqu’en voiture, un cahot a eu raison de la détermination avec laquelle je serrais mes sphincters, laissant échapper un fumet frelaté, je me suis empressée de chuchoter à l’oreille de mon époux que notre chauffeur, Karl, n’en était pas à ses premiers gaz en ma présence :
« Je pense qu’il doit avoir quelques problèmes digestifs, ai-je expliqué. Mais ne t’inquiète pas, je lui ai pris rendez-vous avec ton gastro-entérologue ! »
Confronté à certains manquements à la décence dont il avait souffert au début de notre relation, Côme admit. Il se rencogna dans son siège, fusillant du regard la nuque épaisse de notre serviteur.


En conclusion, si vous voulez faire porter le chapeau à vos domestiques, ne vous gênez pas mais si vous voulez éviter de les licencier tous sans arrêt, manœuvrez avec dextérité :
- En vous incluant dans les conséquences du crime dont vous avez été coupable, avec votre bonne
- En incluant votre époux dans le crime dont serait coupable le domestique.


Sinon, surtout, ne manifestez aucune culpabilité apparente, virez sans état d’âme. Après tout, une sur trois c’est peu.
Non ?

Chapeau : John Galliano

lundi 26 mai 2008

Comment se débarrasser dans l'heure de son cadeau de fête des mères...

8 avis

L’année passée je n’avais pas eu ce problème : Aloysius était trop petit. Mais hier, après le repas concocté par Maria-Magdalena, Aloysius a déposé sur mes genoux un paquet cadeau assemblé de ces petites mains et j’ai manqué sangloter.
D’horreur.

« Cadeau, Cadeau Maman, marmonnait mon fils, les doigts dans sa bouche
- Oh mais que c’est gentil mon trésor, hoquetais-je, de quoi peut-il bien s’agir ? »
En réalité, j’avais déjà senti rouler sous mes doigts ce qui semblait être un collier de coquillettes.
Oui les pâtes !

« Oh des pâtes ! m’exclamai-je, d’une voix quelque peu contrainte.
- Nooooooooon, se mit à hurler Aloysius
- Mais chérie, enfin tu vois bien que c’est un collier, roucoula Côme, perfide ! Attends, je vais t’aider à le passer !
- Oh oui, mais bien sûr que c’est un collier, où avais-je la tête oh qu’il est joli ! Et tu en as même peint quelques unes ? C’est véritablement mignon mon ange ! Maman est très contente ! »

Aloysius paraissait enchanté de ma réaction et j’enfilai donc le bijou alimentaire en cherchant quels prétextes j’allais invoquer dans quelques minutes pour m’en débarrasser. J’attendis qu’Aloysius me quitte des yeux pour me gratter. Je n’aurais pas supporté de lire la déception dans son regard.

« C’est étrange, murmurai-je à Côme, je crois bien que je fais une allergie à ce collier ! Ce doit être la peinture. »
Côme qui avait deviné où je voulais en venir, détourna la tête, outré.

Je fis donc signe à Maria-Magdalena :
« Maria, je ne me sens pas bien, peux-tu aller me chercher un peu de doliprane ?
- Mais que se passe-t-il Madame ?
- Chut, cela risque d’attrister Aloysius, mais je crains de ne pas supporter son collier, je fais une réaction. »
Ma bonne me regarda droit dans les yeux, soupira et tourna les talons.
« Voilà où ça vous mène d’être trop proche de vos domestiques, songeai-je furieuse, ils refusent de vous secourir dans le besoin. »

Je m’étais résolue à passer le restant de mes jours avec ce bijou… disons-le… affreux… autour du cou, lorsque la sonnette retentit. J’étais allongée sur le canapé, une compresse (que j’étais allée me chercher toute seule) sur le front lorsque mes cousins, Calixte et Framboise firent leur entrée. Au bras de Framboise titubait un homme très beau, sans doute un mannequin. Aux bras de Calixte, deux jeunes filles, a priori impubères pouffaient en admirant les ors du plafond.

« Comme c’est gentil d’être passés, maugréa Côme.
- Oui ! Quel dommage que je ne me sente pas en très grande forme, ajoutai-je. Je me redressai maladroitement et me jetai sur Framboise pour l’embrasser. Une idée venait de germer dans mon esprit en apercevant le Collier Peter Som qu’arborait ma cousine. En l’embrassant j’accrochais en douce une coquillette à une grosse perle rouge et je reculais d’un pas faisant mine d’admirer le visage aviné de Framboise.

Malheureusement ce sont les perles rouges qui s’éparpillèrent aux quatre coins de la pièce. Mon collier pendait toujours sur le col de mon tailleur.

« Mon dieu ! s’écria Framboise. »
Et elle se mit à sangloter. J’étais sur le point de la rejoindre pour pleurer avec elle – de rage– lorsque je décidai de tenter une dernière chose ; je me penchai sur mon fils qui regardait, perplexe, Framboise et je lui soufflai à l’oreille :
« Tu sais ce qui la consolerait mon ange ? C’est un collier comme celui que tu m’as fait ! »
Il me regarda plein d’espoir…
« Si tu veux, tu peux lui donner le mien... tu m’en referas un demain ? »
Il cria de joie.

Et Framboise, stupéfaite s’arrêta de pleurer pour enfiler le collier de coquillettes (qui lui allait bien mieux qu'à moi) avant de me dévisager d’un air soupçonneux. Je lui adressai mon plus grand sourire avant de déclarer à la cantonade :
« Installez-vous, je vais en cuisine vous préparer une petite collation ! »

Avant cela, je pris soin de vider les placards de la cuisine de tous les paquets de coquillettes...

mercredi 21 mai 2008

Avanie broie du blanc

3 avis

Ce n'est pas facile de bloguer. Ma cousine m'explique : "il faut surfer sur la vague, être dans le move, finger in the nose...".
Que veut-elle dire par là ?

Aujourd'hui j'ai voulu tester pour vous le point de croix mais Framboise s'est mise à hurler sa désapprobation par mail... C'était horrible, toutes ces insanités en lettres majuscules, j'ai failli ne pas m'en remettre et renoncer une bonne fois à travailler avec elle !

Je n'ai pas compris son attitude, n'est-il pas tout à fait stimulant de s'adonner à des activités manuelles telles que la couture ? Franchement parfois je me demande si elle n'use pas de stimulants qui ont une action dégénérative sur son intellect...

Enfin, puisque ce blog est paraît-il un blog collaboratif, je dois me plier à l'avis général et lorsque Calixte m'a envoyé une piste pour le billet d'aujourd'hui, je l'ai remercié à genoux.

En esprit, s'entend !

"Cousine, a-t-il affirmé, le Wofty te plaira, il est adorable ! Essaie : http://www.freedentwhite.com/index.php/"

J'ai cliqué.

Et j'ai découvert le plus adorable des animaux : un petit minou polaire, avec de grands yeux mouillés des plus délicieux.
Seul au milieu des glaciers de Patagonie, il reniflait amicalement. De temps en temps, joueur, curieux, il se dressait sur ses pattes, humant quelques flocons de neiges.

"Il plaira énormément à mon petit Aloysius, ai-je pensé".
Je me suis donc empressée de remplir le formulaire d'inscription, l'ai baptisé "tout blanc" comme le doudou préféré de mon fils et ai attendu de recevoir la confirmation...
Cinq minutes ont passé, dix minutes, mon point de croix avançait, certes, mais puisque je n'ai pas le droit de vous en parler, je m'abstiendrai...
"Bon, me suis-je dit, on ne reçoit peut-être pas de mail !"
J'ai donc entré mon mot de passe et mon mail dans les cases prévues à cet effet.

Rien !

J'avais réglé le volume assez fort pour ne pas perdre le moindre miaulement que mon Wofty pourrait émettre mais au centième reniflement j'ai commencé à stresser. Mon aiguille s'est plantée dans mon pouce et j'ai dû m'y reprendre à deux fois pour réaliser la pupille du petit lapin de gauche.
Au deux-centième reniflement j'ai coupé le son, j'ai horreur des personnes qui reniflent !

J'ai créé un autre Wofty que j'ai appelé "casse-pieds". Je sais, ce n'est pas très gentil, mais que voulez-vous, j'étais assez énervée.

Là-dessus Aloysius m'a été amené par la nurse au réveil de sa sieste... Apercevant le Wofty debout, il a réclamé "le dessin animé, le dessin animé !".

J'ai créé trois ou quatre Wofty de plus. Finalement, j'ai éteint l'ordinateur et j'ai envoyé Aloysius au jardin avec sa nurse. Après une tisane régénérante, j'ai repris mon ouvrage et je dois dire que j'en suis assez fière.

Mais chut !

Photo : maillot de bain Vanessa Bruno

dimanche 18 mai 2008

Avanie allume son mari récalcitrant

3 avis

Il n'est pas rare d'entendre les hommes parler de leurs besoins en amour. Ils en auraient plus que les femmes, paraît-il. Je serais bien incapable de généraliser. En la matière je ne suis pas une experte, je n'ai connu que Côme, mon cher époux.
Demander à ma cousine son avis sur la question l'inciterait à m'exposer ses turpitudes dans le détail et il me semble que je bénéficie assez souvent de ses confidences pour ne pas risquer une indigestion.

Cependant, il m'arrive de me sentir un peu... seule... oui, et frustrée lorsque je rentre dans la chambre et que je vois Côme endormi ou compulsant frénétiquement un livre sur la Bourse, la finance ou la gestion d'entreprise. Je n'en suis pas fière, mais, il m'est arrivé souvent, dans ce cas-là, de me déshabiller devant lui et de revêtir un ensemble Chantal Thomas pas vraiment pratique pour dormir. Or, le temps que j'ajuste mes porte-jarretelles, mon mari, s'était assoupi, bouche ouverte.

Je résiste généralement à mon premier élan qui est de sortir en claquant la porte. Je ne voudrais pas me retrouver face à la nurse à moitié nue. De plus, Côme, certainement, ne se rendrait même pas compte de ma colère.

J'ai tenté, une fois, de changer malencontreusement de chaîne, le premier samedi du mois, au moment où, sur Canal Plus, des hommes et des femmes s'adonnent aux jeux sexuels les plus débridés. Feignant d'être paralysée, le doigt sur le bouton de la télécommande, j'ai attendu la réaction de Côme, espérant que la vision de ces agapes tumultueuses aient éveillé en lui quelque désir. Mais il s'est écrié "Oh ! Avanie, très chère, remettez donc cette émission sur la Chasse en Amérique du Nord, elle m'intéressait vivement !"

Si je me blottis contre lui, mine de rien, dans la nuit, il se retourne en maugréant, et parmi les mots incompréhensibles qui franchissent ses lèvres sèches, les seuls que je comprends sont "je travaille demain, moi..."

Pourtant, par ailleurs, Côme est un compagnon très épris et attentionné. Le dimanche, lorsqu'il est bien reposé, il s'avère d'une compagnie des plus agréables. Il n'a jamais négligé une fête, un anniversaire, il rentre souvent de ses voyages d'affaires avec des présents d'un goût délicat. Nos ébats, à la fin de la journée sont très satisfaisants. On ne dirait pas, à le voir, mais une fois ôté son costume, sa cravate et... ses dessous, Côme est très bel homme, d'une virilité à faire pâlir d'envie plus d'un Calixte.

Quel dommage qu'il soit si souvent fatigué !

Je vous épargnerai la liste des affronts que j'ai subi à essayer d'avoir avec lui, un peu plus de rapports sexuels. Voici ce qui a fonctionné, hier soir.

Mon époux lissait Probability Models for Economic Decisions de Roger Myerson lorsque je me suis plantée devant lui.
D'une voix glaciale je lui ai ordonné:
"Monsieur, posez ce livre immédiatement !"
Il m'a regardée, interloqué, a retiré ses lunettes pour se frotter les yeux mais il n'a pas osé poser de question. Je portais un bustier et un string de dentelle noire.
J'ai lancé :
"Soit vous me pénétrez dans les cinq minutes, soit vous mangerez votre livre, feuille à feuille."

Côme a paru hésiter.

Finalement, il a pris la décision la plus respectueuse pour son ouvrage...

jeudi 8 mai 2008

Où Anna Gavalda interviewe Avanie...

0 avis

Il y a quelques semaines que Maria-Magdalena, ma femme de chambre, me serine avec l’invitation à dîner que lui avait transmise sa nièce, Constance, nounou de son état. Pour hier.

Nous étions allées ensemble lui choisir un tailleur chic et sobre chez Chanel, je lui avais même laissé son après-midi car j’imagine qu’il doit être stressant de ne pouvoir se préparer tranquillement avant une sortie. Pour le soir, il était prévu que Karl la dépose et la ramène.

Aucune inquiétude à avoir donc.

Normalement .

Mais Maria-Magdalena est une angoissée. Elle n’a pu s’empêcher d’appeler sa sœur avant de partir et elle a appris que la patronne de Constance serait présente au dîner. D’ailleurs, c’était bien la moindre des choses, puisqu’il avait lieu chez elle, à Melun.

« Je n’avais pas du tout compris cela ! Je vous en prie, Madame Avanie, venez avec moi ! Je ne connais rien de littérature, je ne saurai pas quoi dire…
- Mais je n’ai même pas lu son dernier roman ! Et puis que va penser Côme s’il ne me trouve pas à la maison ?
- Vous direz que c’est pour votre blog, s’il vous plaît Madame ! »
Que voulez, vous, j’ai cédé !

La maison d’Anna Gavalda est ravissante, très champêtre. Par contre mes Louboutin n’ont pas vraiment apprécié les graviers et j’ai manqué me tordre la cheville au moment où la maîtresse de maison a ouvert la porte, vêtu d’une minijupe en jean, de collants en laine violets et d’une veste officier curieuse. Avec ma nouvelle robe Ellie Saab, j’ai eu l’impression d’être un tantinet déplacée mais aussitôt Madame Gavalda m’a mise à l’aise :
« Oh ! Quelle robe ravissante, et comme vous la portez bien ! s’est-elle écriée. »
Puis elle a débusqué ma femme de chambre qui se cachait derrière moi :
« Entrez Maria-Magdalena, je suis ravie de vous rencontrer, Constance m’a tellement parlé de vous ! »

Du coup, ma bonne n’en pouvait plus de rougir. Elle tordait ses mains contre son ventre comme une collégienne. Dès que notre hôtesse a eu le dos tourné je l’ai admonestée de manière un peu vive :
« Arrêtez de gigoter comme cela, Maria-Magdalena, vous allez me communiquer votre trac ! »

Nous avons été invitées à entrer dans le salon. Dans un canapé, Louis, un adolescent à coiffure tektonik, lisait. Il nous a adressé un vague sourire et a replongé aussitôt la tête dans son livre. Sa sœur, Félicité, au contraire s’est précipité sur nous et a entrepris de nous raconter sa journée de classe. Nullement embarrassée, Anna (puisque c’est ainsi qu’elle m’a demandé de l’appeler) s’est excusé en nous expliquant qu’elle devait finir de préparer le repas. Je me suis donc glissée dans un fauteuil près de la bibliothèque tandis que Maria-Magdalena, pétrifiée, restait debout à écouter les bavardages de la fillette.

Lorsqu’enfin Constance a fait son apparition j’allais m’endormir dans le fauteuil. Je me suis levée d’un bond et j’ai réalisé que j’allais passer la soirée avec deux domestiques et une écrivain. « Si Côme savait cela, ai-je songé !». Je ne savais pas que j’allais être sur la sellette à la place d’Anna.
« Alors, il paraît que vous écrivez ? m’a interrogée la maîtresse de maison
- Moi ? Ecrire, me suis-je esclaffée, vous n’y pensez pas !
- Mais si, Constance ? Vous m’avez bien dit qu’Avanie rédigeait un blog ?
- Ah ça ! ai-je reconnu… Oh ce n’est pas vraiment de l’écriture ! Pas comme vous en tout cas, d’ailleurs, je voulais vous dem…
- Il n’y a pas de forme d’écriture plus noble qu’une autre ! D’ailleurs moi j’aurais préféré être nègre d’écrivain, pouvoir écrire en me cachant derrière quelqu’un qui assume à ma place renommée, interview, télévision. Je serais plus libre ! Enfin bref ! Alors, parlez-moi de votre blog !
- Euh, c’est ma cousine Framboise qui m’a convaincue de me joindre à elle…
- Oh ! C’est très bien, c’est une histoire à plusieurs voix alors ? J’adore ça, les histoires chorales…
- Oui, notre cousin Calixte –le frère de Framboise – participera aussi de temps en temps. Il souhaite ne faire que les rubriques sex… enfin, amoureuses… mais Framboise voudrait que chacun essaye un peu de tout.
- Et de quoi ça parle ?
- Oh ! de rien ! Enfin de tout, bonnes manières, cuisine, beauté, amour, enfants…
- C’est très riche comme matériau. Vous enquêtez sur le terrain ?
- Et bien, nous sommes le terrain ! Nous parlons de ce que nous connaissons… Enfin, sauf quand je vais dîner chez quelqu’un dont je n’ai pas lu le dernier livre !
- Oh ! Vous le lirez plus tard ! Et dites-moi, vous écrivez beaucoup ?
- J’essaye de m’y mettre régulièrement. Je ne suis pas encore vraiment habituée. J’abîme souvent mes ongles sur le clavier par exemple…
Elle éclate de rire !
- Avanie, vous êtes extraordinaire, il se peut bien que je m’inspire de vous pour un de mes personnages ! Vous me rappelez une camarade qui était en classe avec moi à Saint-Pie X de Saint-Cloud !
- Ce n’est pas vrai ! Vous avez été aussi chez les sœurs ?
- Oui, je portais une jupe bleu marine et récitais ma prière à tous les repas.
- Excusez-moi de vous le confier, mais j’ai été dégoûtée de la religion. D’ailleurs, je n’ai jamais eu la foi…
- Oh moi si ! Mais je l’ai perdue. Pourtant, je ne peux m’endormir sans avoir récité un « Je vous salue Marie » pour mes enfants…
Son fils Louis lui jette un regard noir :
- Tu as vraiment besoin de raconter cela à tout bout de champ ? crache-t-il, mécontent.
- Excuse-moi, mon chéri, mais je crois qu’Avanie et moi nous comprenons sur ce point.
- Parfaitement ma chère ! acquiesçai-je. Même si moi je ne peux même plus me servir de mots sacrés pour jurer. Alors la prière ! Mais c’est un secret. Même mon époux ne sait pas que je sèche la messe tous les dimanches matins, ne l’ébruitez pas...
- Ne vous inquiétez pas. Le personnage de mon prochain roman portera un autre prénom que le vôtre. Nous serons les seules à connaître la vérité, Constance, Maria-Magdalena, vous et moi ! Pour sceller notre pacte, tiens, je vais chercher la bouteille de champagne que vous avez apportée. Elle doit être fraîche.

Un peu plus tard – nous venions d’ouvrir une énième bouteille, lorsque Anna Gavalda me demanda :
- Et dans quelle pièce écrivez-vous Avanie ? Dans quelle tenue ?
- Oh ! Le plus souvent je m’installe sur le canapé avec mon portable sur les genoux. Je suis en déshabillé, parce que j’écris le soir après le coucher du petit, ou le matin, avant son réveil.
- Avanie, vous êtes vraiment un personnage ! Je vais aller sur votre blog dès que vous aurez le dos tourné ! Et puis, ça ne vous embête pas que je prenne des notes, pour mon prochain roman ? Vous m’inspirez… »


Photos : Robe Elie Saab, Lingerie Fifi Chachnil