vendredi 20 juin 2008

Avanie coache Bertille

A minuit dix, hier, Côme m’a secouée. J’ai ôté mon masque pour les yeux , mes boules Quiès et un mot tel que « Gueu » a franchi ma bouche desséchée par le sommeil. Sur ma tête, la fourrure rose de ma nuisette formait un curieux panache.
Côme me dévisageait d’un air furieux.

« Que se passe-t-il ? ai-je baillé
- Ton cousin Calixte est au téléphone. Il souhaite te parler.
- Mais enfin Côme, ai-je protesté, tu aurais pu lui dire que...
- Figure-toi ma chère, que, bien entendu, je lui ai demandé de rappeler à une heure raisonnable. Je l'ai également informé du fait que nous avions sombré tous deux dans un sommeil réparateur mérité. Pourtant, il s'est obstiné. Il paraît que l'affaire est de la plus haute importance. Alors, au dixième coup de téléphone, je te réveille et je te somme d'aller lui répondre. Merci !

Je me suis donc extirpée de mes rêves et, adossée ma pile d'oreillers, j'ai articulé un allo peu amène.
- Ah ! Douce cousine, a vitupéré un Calixte éméché. Alors, raconte-moi, tu dors en quelle tenue ? Un pyjama en pilou-pilou de chez Calvin Klein ?
J'ai gloussé :
-Mon pauvre cousin, décidément tu ne me connais guère ! Figure-toi que je porte une nuisette rose transparen...

Ma phrase est restée suspendue, crucifiée aux quatre coins par les regards assassins de mon époux.

- Je veux dire : mais qu'est-ce qui te prend de nous déranger à cette heure indue ? Enfin Calixte !
- Bon, c'était pour te prévenir que Bertille allait bientôt prendre le train. Elle arrivera de Suisse vers sept heures du matin. Si tu pouvais aller la cueillir.
- Mais qui est cette Bertille, je ne connais pas cette...
- Rhhooo Avanie, détends-toi un peu, relax ! Cette jeune fille de bonne famille est la sœur de mon cousin Estèphe. Elle vient de claquer la porte de son pensionnat pour tenter l'aventure à Paris. J'ai promis à ses parents que tu te chargerais de la remettre dans le droit chemin.
- Moi ? Mais je...
- Oui toi ! J'ai pensé que tu alliais des qualités de diplomates et un goût indéniable en matière de mode. Bertille a besoin d'une garde-robe si elle veut se lancer dans le monde du travail.

Je rougis. Ainsi Calixte m'adressait des compliments ! Je n'en revenais pas :
- Alors ça roule jeunesse ?
- Euh, bon je crois que...
- Super ! a-t-il hurlé dans le combiné. Bon adjugé vendu ! Merci, bye bye ! Ah et je te préviens quand même, ça ne va pas être une mince affaire.
Avant qu'il ne raccroche j'ai entendu une foule éclater de rire avec lui. Il m'a semblé reconnaître les éclats hystériques de Framboise mais je n'en suis pas certaine.

J'avais oublié Côme. Il a saisi le téléphone qu'il est allé reposer sur son socle et il a dit :
- J'ai rêvé, ou, en ma présence, tu as flirté avec ton cousin ?
- QU'EST-CE QUE TU DIS ? J'AI REMIS MES BOULES QUIES ? ai-je prétendu.
Côme m'a tourné le dos, furieux, et il s'est rendormi aussitôt.

C'est Karl qui nous a ramené Bertille, vers midi. "Elle a tenu à visiter la ville, m'a-t-il expliqué". Comme je fronçais les sourcils, il m'a expliqué : "Elle n'est pas facile à contredire vous verrez !"

Puis, Bertille a surgi dans le salon. Comment la décrire ? Par où commencer ? Tout, chez elle, est gigantesque. Elle doit mesurer un mètre quatre vingt et peser une centaine de kilos. Ses cheveux sont immenses et volumineux. Sa voix tonitruante. Sa bonne humeur communicative. Ses colères phénoménales.

Je lui ai proposé d'aller faire un tour Avenue Montaigne et elle a refusé, prétextant que ni Chanel ni Dior n'avait de tenues dans sa taille.
- Et puis, ce que je veux d'abord, ce sont des sous-vêtements. Avanie, je sais ce qu'il faut faire : Cherchons sur internet, il paraît que tu es une experte en informatique.
J'ai protesté mais Bertille ne m'a pas entendue. Elle n'arrêtait pas de parler.
- Mère et Père croient que je ne sais pas quoi faire dans la vie. C'est faux ! Je veux être mannequin !
Là, je vous l'avoue, j'ai craché mon infusion sur l'écran d'ordinateur et j'ai laché ma tasse par terre.
- Ma petite Bertille, ai-je commencé en me frottant les mains, comment dire ?

La demoiselle, imperturbable, a tapé sur mes mains et a poursuivi :
-Un mannequin grande taille, tu t'en doutes ! J'ai rencontré un photographe, il me veut dans son agence... Tu le connais peut-être ?
- Euh ça...
- Il s'appelle Massimiliano, un truc comme ça.
- Ah et..
- Ouais il est beau, magnifique, il m'a déjà fait faire quelques photos mais il voudrait voir comment je suis, enfin tu vois quoi, en petite tenue !
- Je ne crois p...
- Alors voyons voir ce qu'il y a sur le web !

Après quelques clics, Bertille avait jeté son dévolu sur plusieurs tenues suggestives.

Elle n'a même pas accepté de prendre au moins quelques sous-vêtements pour le quotidien. Des choses sobres et élégantes qui lui permettraient de porter un tailleur avec élégance :

Alors que je tentais de la convaincre de saisir une délicieuse robe bleue-marine, Bertille m'a regardé dans les yeux :
- Avanie, ma chéri, je n'ai que dix-huit ans mais je suis plus avertie que toi, il me semble. Il n'y a qu'une chose qui compte dans la vie, c'est le sexe... L'amour, si tu veux. C'est ce que m'a dit Massimilianio et je suis d'accord avec lui ! Crois-moi, je ne vais pas me transformer en bonne-sœur, j'en ai assez vu au pensionnat !

J'ai fondu en larmes.

Alors que je tentais de me justifier, Bertille m'a serrée contre son opulente poitrine :
- Tu sais, Van, il n'est pas trop tard pour changer de vie. Quitte ton mari et viens avec moi, je suis sûre que Massimiliano voudra t'embaucher aussi, tu es encore bien pour ton âge !

Mes sanglots ont redoublé et je l'ai raccompagnée à la porte.

Deux jours plus tard, j'ai reçu les photos de Bertille. Avec un petit mot :

"Il m'a dit de faire l'amour à son appareil photo, j'espère que tu ne seras pas choquée ! Et, au fait, il attend ton coup de fil !"

Je l'ai trouvé somptueuse...














Mannequin : Velvet

4 commentaires:

Framboise a dit…

Juste pour dire que les gloussement c'était pas moi...j'ai pas bougé de Paris.
Je sais que ça t'aurais rassurée, mais ça devait être une pintade... voire deux.

Sinon Bertille à Paris ? Tous aux abris... Tu lui a pas dit où j'habitais hein ? parce que les tornades survoltées à la voix de ténor, très peu pour moi.

Anonyme a dit…

Il n'y a que moi pour vitupérer des compliments.

Anonyme a dit…

Framboise,

Pourtant il y avait quelque chose d'hystérique qui m'a rappelé..; enfin bref !
Comment vas-tu très chère cousine ? Toujours en couple ? Si tu savais comme j'en suis heureuse !

Calixte,

Je crois bien que oui, en effet.

Anonyme a dit…

c'est vrai qu'après le 25e verre en général, Calixte ne se maîtrise plus trop. Douce cousine... ouarf!