lundi 7 juillet 2008

Bertille se meuble

Avanie a éclaté de rire quand je lui ai annoncé ça. Elle n'a pas su par où commencer :
"Ecoute, Bertille, c’est cocasse, aller à Ikéa ! Un trip suédois, je n’y aurais jamais pensé ! Il faut un début à tout ! (grincements de dents).
- Attends, Avanie, tu n'es jamais allée là-bas de ta vie ?
- Des meubles bon marché en pâte à bois, comme dans les films de Bergman... Je ne sais pas, la nurse est en congé, s'esquiva-t-elle...
- Aucun problème ! Pas besoin de nurse ! Il y a des garderies gratuites là bas ! Animés par des grands blonds tennismen, des bandeaux dans les cheveux ! Et des superbes piscines à balle, dis-je, dévisageant Aloysius, ce petit singe muet qui me tire la langue, avec peut-être des seringues de drogue dedans, tu pourras refaire votre vie après, Avanie !"

Victoire.

Karl nous conduisit dans la zone industrielle. Je vis Avanie à mes côtés se recroqueviller dans son siège.
"Va-t-il y avoir des émeutes, demande-elle ? Ne peut-on pas aller à Roche-Bobois, pour faire simple, même Habitat pourquoi pas ?"

Samedi après midi, il y avait le monde entier agglutiné chez les rois du contre-plaqué. Ce n'était pas possible, autant de monde, les gens doivent se sous-traiter pour être aussi nombreux ! Ils emploient des figurants !
"On se croirait dans le RER, répétait fébrilement Avanie.
- Mais vous prenez le RER, ma chère, demandais-je malicieusement ?
- Bien sûr que non, et en voici la raison évidente !"

A l'entrée, il y avait des petits appartements de démonstration, pour expliquer comment on peut se meubler du sol au plafond en IKEA. Des 80 mètres carrés jusqu'au studio de 5, avec un superbe lit-frigo-penderie-douche-fenêtre nommé Inkgijst Börkj (ce qui veut dire "Papillon de lumière" en suédois), et qui se prononce pareil si on passe le disque à l'envers.

Je répétais à Van, la tirant par la manche :
"regarde ! Comme ça doit être génial de vivre là dedans ! Le monde parfait ! Dis-donc, c'est surréaliste comme c'est bien rangé, aussi propre, c'est vraiment un truc qu'on voit jamais dans la vraie vie !"
Si, chez Avanie, en fait.

Elle n'a pas voulu laisser Al dans la piscine à balle. En fait, c'était plutôt une piscine à mioches. Il y en avait partout, en chaussettes qui puent, à se sauter à pieds joints sur la colonne vertébrale. "Comment pourrais-je laisser mon enfant dans ce marasme humain ?" Elle garda donc Aloysius contre elle, se frayant un chemin parmi la foule.

"Bertille, pourquoi autant de monde ? C'est incroyable, ils n'aiment tout de même pas vivre comme ça ?
- Chère Avanie, ce sont les soldes ! Les gens veulent faire des bonnes affaires !
- Mais pourquoi ne payent-ils pas plus cher, pour être plus tranquille, tout simplement ?"

J'ai levé les yeux au ciel sans rien ajouter. Je n'allais pas la contrarier. On ne sait jamais ce qui peut se produire, une fois à la caisse. Une CB qui ne marche pas, etc.

En bref :

Les cadres : accrochés au mur, les cadres contiennent de grandes images avec des couleurs toutes en noir et blanc, des visions de ports nordiques au matin, des montagnes plates, bref, des images qui donnent envie de tapisser sa chambre et de devenir social-démocrate.

L'objet super pas cher : il s'agit d'un objet banal (éponge, casserole, pince à linge, planche à découper) avec un design complètement dingue (en forme de pieuvre, de twingo, ou d'huitre de l'espace) et tellement pas cher qu'on en veut des centaines !
Exemple : "Regarde Avanie, quelle économie ! Une casserole, ça coute 50 euros, et ici, elle est à 1 euro ! Du coup, j'en ai pris cinquante !!!!"

Billy : L'étagère classique. Académique. Les romains avaient déjà les mêmes dans leurs temples. Le must du meuble d'étudiant fauché ou de l'ex-étudiant toujours fauché. Idéal pour empiler ma collection de "Femme inactuelle".

Les matelas Ikéa : pour prouver que c'est solide, ils ont inventé des robots qui se couchent et se lève toute la journée dessus, vingt fois par minutes. Du coup, les matelas sont solides, mais les robots fatigués.

La chambre d'enfant : le siège bleu, suspendu au plafond ! C'est tellement cromignon, le petit morpion qui se balance tel un pierrot lunaire, avec le plafond qui cède et le voisin du dessus qui tombe dans la chambre !

Sinon, j'ai chargé le chariot avec mon futur appartement dedans. On aurait dit un char d'assaut. Arrivée à la caisse, ma carte bancaire n'est pas passée. J'ai regardé Avanie avec une expression de chaton triste, d'un air glacial elle a sorti sa Siouper Visa, je lui ai dit :
"Je te rembourse ce soir ! Hein ? Avec un chèque (en bois) (en contre-plaqué) !"

De retour vers Karl qui s'était endormi après cinq heures dans la voiture, Avanie lui dit, pour se calmer les nerfs : "Karl, vous vous prenez pour un routier à dormir de la sorte ? Est-ce que je suis en train de chômer, moi ?"

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'admire l'aménagement de l'espace des appartements de démonstrations. Et dispose de l'espace nécessaire pour tenter de le reproduire en conditions réelles (et pas les 80m²) Il faut de plus souligner qu'un lit mezzanine Ikea, même si la moitié des vis ne rentrent pas à l'endroit prévu (et donc ne servent à rien, nous sommes d'accord) tient quand même debout. Au moins 2 ans. Si on dort sans bouger. Et éventuellement sans respirer.
J'ai hâte de lire le compte-rendu de montage!

Anonyme a dit…

Tout dépend après si j'ai une vie trépidante, ou pas. Si oui, je pourrais m'accomoder de la destruction du lit IKEA. Mais tout aussi bien, le lit peut tenir 2 ans. Ou 5. Ou 100.

Léontine a dit…

Ma chère Bertille, fais-moi penser, avant de t'emmener où que ce soit, à vérifier tes liquidités...